Le président de la commission des Affaires sociales du Sénat, Philippe Mouiller (LR), était particulièrement bavard ce mercredi 13 novembre. Face aux journalistes, lors d’une conférence de presse dédiée au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, que le Sénat va examiner en première lecture la semaine prochaine, l’élu des Deux-Sèvres a indiqué que la participation de la majorité sénatoriale à la coconstruction du budget, dans ces délais serrés, est conditionnée à la garantie de « réformes à venir » – le véritable enjeu selon lui.
Car, selon le sénateur, « ce texte resserré sur des objectifs financiers est beaucoup plus restreint, dans notre champ, avec des sujets qui restent en suspens ». Et, ne voulant pas se retrouver dans la même situation l’année prochaine, la rédaction des annexes sera ainsi importante, pour « passer un message formel de nécessité d’un certain nombre de réformes », parfois même « au lendemain du PLFSS », a-t-il précisé, citant l’autonomie, l’organisation de la santé, le développement des services de la petite enfance et la gestion de la dette.
Près de 80 amendements adoptés en commission
En attendant le grand soir en santé, les rapporteurs du texte pour 2025 ont détaillé les principales mesures que la commission a ajoutées (via 77 amendements) sur le texte transmis par le gouvernement. C’est à partir de ce nouveau texte que la commission va continuer à examiner en début de semaine prochaine les amendements des autres sénateurs (le dépôt est ouvert jusqu’à la fin de cette semaine). En parallèle se tiendront les débats en séance publique, qui promettent d’être animés. Le vote solennel au Palais du Luxembourg est lui programmé pour le mardi 26 novembre.
Pour l’heure, un certain nombre de dispositions privilégiées par la commission des Affaires sociales concernent les médecins. Les amendements adoptés se veulent plutôt rassurants pour la profession.
Les dispositions autorisant gouvernement et Assurance-maladie à baisser unilatéralement les tarifs applicables à la biologie et l’imagerie médicale ont été supprimées par la commission des Affaires sociales du Sénat – la rapporteure de la branche maladie, Corinne Imbert (apparentée LR), déclarant la Chambre haute « attachée aux dispositifs conventionnels ».
Idem quant au remboursement de certains produits, actes et transports prescrits soumis au respect, par le prescripteur, des recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS). Les sénateurs ont préféré développer l’utilisation du dossier médical partagé (DMP), en exigeant sa consultation avant certaines prescriptions et en incitant les soignants à le consulter et à l’alimenter. « Un outil pas assez installé », selon la rapporteure de la branche maladie, qui permettrait selon elle d’éviter des actes redondants.
Lutter contre la financiarisation
Un amendement portera sur l’introduction de mesures contre la financiarisation de l’offre de soins, quelques semaines après la publication du rapport de la mission sénatoriale.
L’encadrement des centres de soins non programmés, voulu par le gouvernement, est soutenu par les sénateurs de la commission des Affaires sociales, favorables à la production d’une « charte » (l’exécutif évoque plutôt « un cahier des charges »), visant à définir le rôle et le fonctionnement de ces structures. La rapporteure LR Corinne Imbert a également précisé qu’il est « attendu » que les professionnels y exerçant participent à la permanence des soins.
Pas de limitation du secteur 2, mais une « taxe lapins »
Corinne Imbert a précisé que le chiffon rouge de la généralisation de l’Optam dans le secteur 2 et la question des dépassements d’honoraires ne sera pas abordé dans ce texte. En revanche, les sénateurs vont, à nouveau, porter la création d’une « taxe lapins » pour les patients n’honorant par un rendez-vous avec un professionnel de santé.
D’autres mesures concernent par exemple la suppression de l’extension de l’obligation de dispensation à l’unité des médicaments ou l’accélération du déploiement de l’application Carte vitale sécurisée. Les sénateurs veulent également renforcer la coopération entre l’assurance-maladie obligatoire et complémentaire en matière de lutte contre la fraude.
Contre la hausse du ticket modérateur
Pour soulager les finances des hôpitaux, la commission veut également étaler la hausse des cotisations à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL). Pour l’hôpital, ce sera 300 millions d’euros en moins, a rapporté Élisabeth Doineau.
Quant au chantier du 1,1 milliard de transferts aux complémentaires santé, qui avait défrayé la chronique, Corinne Imbert a réaffirmé l’opposition du Sénat à toute augmentation du ticket modérateur, « non actée » pour l’heure, ni dans le PLFSS, ni ailleurs.
Plus de taxes sur le tabac et le sucre… pas sur l’alcool
Sur les taxes comportementales, des amendements toujours issus de la commission visent à revaloriser le tarif de la dernière tranche fiscale de la « taxe soda » et une augmentation du barème de la taxe sur les boissons édulcorées – laquelle n’a pas été revue depuis 2021. L’objectif étant, pour Élisabeth Doineau, que « les fabricants changent leurs recettes » et de récupérer, au passage, 200 millions d’euros.
Si la vision des sénateurs de la commission est suivie par leurs collègues en séance publique à partir de la semaine prochaine, le tabac sera lui aussi concerné par une augmentation de l’objectif de prix moyen de 13 euros du paquet de cigarettes en 2025 – avancé de trois ans – 350 millions d’euros attendus. L’alcool n’est pas concerné, car l’impact sur la filière serait trop important, a justifié Philippe Mouiller, évoquant aussi un « choix politique ».
Sept heures de travail annuel en plus
Enfin, toujours côté recettes, les sénateurs espèrent instaurer une contribution de solidarité par le travail, non pas par un jour férié en moins, comme l’a évoqué le gouvernement, mais par une augmentation de sept heures de la durée du travail et un passage de 0,3 % à 0,6 % de la contribution de solidarité pour la branche autonomie. Cette mesure permettrait d’apporter 2,5 milliards d’euros de ressources pérennes en faveur de l’autonomie des personnes âgées et en situation de handicap.
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