"En n'agissant qu'imparfaitement sur les différents leviers disponibles, l'État ne s'est pas donné les moyens d'infléchir les comportements à risque." Le dernier rapport de la Cour des Comptes est plutôt sévère sur les politiques lutte contre les consommations d'alcool. Dans ce document rendu public lundi 13 juin, les magistrats financiers observent, d'abord que la réglementation de la distribution n'est plus adaptée à l'évolution des habitudes de consommation et au développement de la vente à emporter, qui représente 60 % des ventes mais moins de 17 % des contrôles, "rendant le produit très accessible, notamment aux mineurs, malgré l'interdiction de vente qui leur est applicable". Sur le versant publicité, la Cour pointe aussi les assouplissements successifs à la loi Evin. Et l'institution de la rue Cambon regrette que la fiscalité soit "peu inspirée par des objectifs de santé publique".
Le rapport estime aussi que "le dépistage de l'alcool au volant régresse", du fait des contraintes pesant sur les forces de sécurité et de la lourdeur de la procédure : éthylotest, puis éthylomètre, voire prise de sang... En outre, les sanctions restent à ses yeux peu dissuasives ou difficiles à mettre en œuvre comme la suspension de permis. "La police de l'ivresse publique s'avère coûteuse en personnel et aucune mesure d'accompagnement n'est prévue pour orienter la personne dégrisée vers une démarche de soins," relèvent les auteurs du rapport.
La ROSP et une consultation de repérage pour mobiliser les praticiens
La prise en charge des patients présentant des consommations excessives et des pathologies liées à l'alcool pâtit également, selon la Cour, de la "faible implication de la médecine générale". Même si elle croit savoir que l'implication des jeunes praticiens et ceux exerçant en maisons de santé est plus forte, la Cour estime que "la place des généralistes et des médecins du travail pourrait être bien plus importante qu’actuellement, aussi bien dans le repérage que dans la prise en charge". Selon un sondage commandé pour l'occasion par la Cour, "deux tiers des médecins généralistes ne connaissent pas le dispositif de repérage précoce issu des bonnes pratiques et 2 % seulement le pratiquent de manière formalisée".
Pour remédier à ce sous-investissement supposé de la médecine générale, le rapport donne quelques idées aux actuels négociateurs de la convention médicale. Il suggère ainsi d'inclure le RPIB (repérage précoce et intervention brève) dans la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP). Autres recommandations : la création d’une consultation longue de repérage et de prise en charge des addictions et le développement de prises en charge partagées entre médecins et personnels infirmiers cliniciens. "Les addictions pourraient également faire partie des thématiques prioritaires de santé publique dans le cadre des contractualisations à venir entre les ARS et les futures communautés professionnelles territoriales de santé," évoquent les auteurs.
Au-delà de la médecine de ville, la Cour juge nécessaire aussi de mieux adapter les messages en direction des consommateurs à risque et de développer la prévention et la communication vers les publics les plus fragiles. Sur le plan répressif, elle insiste pour que soient bannies la consommation sur le lieu de travail, pour relever la fiscalité sur les boissons alcoolisées. Enfin, sur la route il faudrait, selon la Cour, "accroître la probabilité des contrôles et des sanctions immédiates en ayant recours à un seul appareil portatif homologué de mesure de l'alcoolémie contraventionnelle et délictuelle".
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