Le Conseil national de l'Ordre des médecins a décidé d'appeler un chat un chat. Selon lui, il n'y a pas de médecine qui soit « douce », « alternative », « complémentaire » ou encore « naturelle » mais des pratiques qui ne sont pas reconnues sur le plan scientifique par la médecine conventionnelle et qui n'appartiennent pas à la formation initiale des médecins. Des prises en charge en plein essor aux risques d'exercice illégal de la médecine et de dérives thérapeutiques voire sectaires, souligne le Cnom après analyse des multiples pratiques de soins non conventionnelles dans un rapport rendu public ce mardi.
Les termes « médecine » ou « docteur » n'étant pas assez encadrés ou protégés, ils sont volontiers utilisés de façon « volontairement ambiguë » par des non-professionnels de santé, se désole l'Ordre, qui appelle carrément à une « modification de la loi » pour remédier à cette confusion des genres.
Inventaire
L'institution a dressé l'inventaire des pratiques de soins non conventionnelles (PSNC) les plus courantes en France sur les près de 400 recensées par l'OMS. Apithérapie (soins par les piqûres d'abeille), lithothérapie (soins par les pierres) ou encore sylvothérapie (soins par les arbres) – pour les plus exotiques – se distinguent néanmoins de l'acupuncture ou de prescription de l'homéopathie pratiquées exclusivement par des médecins ainsi que de l'ostéopathie, trois procédés thérapeutiques « validés scientifiquement et encadrés juridiquement » selon le Cnom.
« L'Ordre des médecins est très sollicité sur ce sujet des PSNC depuis des années, mais ça s'est vraiment accru depuis le Covid, a expliqué à l'AFP la Dr Claire Siret, chargée du dossier au sein du Cnom. Ce document doit sensibiliser les professionnels de santé à ces pratiques ». L'experte s'inquiète aussi de « l'entrisme de certaines pratiques à l'Université » et souhaite interpeller les doyens de faculté sur la proposition, en dehors des filières de médecine, de « diplôme universitaire de médecine anthroposophique ».
Exercice illégal, perte de chance
D'après la Miviludes, l'observatoire gouvernemental des dérives sectaires, 70 % des signalements qui lui sont faits concernent aujourd'hui des PSNC. Par ailleurs, 60 % des personnes ayant recours à ces pratiques sont atteintes d'un cancer. « Si, dans de nombreux centres de prise en charge des cancers, les soins de support ont trouvé leur place et améliorent la qualité de vie des patients, il faut rappeler qu'ils ne soignent pas » écrit le Cnom qui avance une explication sur l'engouement pour ces pratiques. La découverte des PSNC par le patient atteint d'un cancer lui permettrait de trouver un « sentiment de reprise de contrôle ».
Aujourd'hui, l'Ordre tire la sonnette d'alarme sur les effets de l'absence d'encadrement de ces pratiques dans leur ensemble. Pour les personnes qui les pratiquent, le risque est celui de poursuites pénales au titre de l'exercice illégal de la médecine. Et pour les patients surtout, elles s'apparentent à des « dérives thérapeutiques entraînant une perte de chance dans la guérison et une mise en danger de la vie d'autrui ». Quand il ne s'agit pas de dérives sectaires exploitant « un état de sujétion psychologique ou physique, la privant d'une partie de son libre arbitre »…
Selon l'AFP, une première réunion du comité d'appui pour l'encadrement des PNCS doit se tenir ce mercredi sous l'égide des ministères de la Santé et de l'Intérieur, rassemblant notamment l'ANSM, la Miviludes ou le collectif No Fakemed. Le Cnom regrette dans son rapport que « l'absence d'organe d'évaluation et de contrôle officiel » permette « à certains organismes de s'autoproclamer "agence" d'État ».
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols
Le texte sur la fin de vie examiné à l'Assemblée à partir de fin janvier
Soumission chimique : l’Ordre des médecins réclame un meilleur remboursement des tests et des analyses de dépistage
Dans les coulisses d'un navire de l'ONG Mercy Ships