« Du point de vue du financeur, doit-on s’empêcher d’appliquer une régulation [des tarifs de la biologie médicale], quand on voit qu’il y a des gains de productivité et un niveau de rentabilité tel qu’il est aujourd’hui ? Je pense que ce serait paradoxal », a déclaré Thomas Fatôme, patron de la Cnam, devant la commission des affaires sociales du Sénat le 31 octobre. « La régulation tarifaire a des limites. Les avons-nous atteintes ? Je ne sais pas », a-t-il ajouté, argumentant que le secteur présente « une rentabilité élevée, y compris les petits laboratoires », avec des excédents bruts d’exploitation sur chiffre d’affaires de 17 % en moyenne en 2023.
Thomas Fatôme était interrogé ce jour par la rapporteure de la branche maladie du Budget Sécu pour 2025, Corinne Imbert (apparentée LR), sur la possibilité d’un affaiblissement du dialogue conventionnel lié à l’article 15 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2025). Celui-ci inscrit dans le marbre, pour l’imagerie et la biologie, la nécessité de conclure des accords pluriannuels de maîtrise (objectifs quantitatifs, engagements des partenaires conventionnels, modalités de suivi et mesures correctrices) avec la Cnam pour « sécuriser les financements » – ce qui ne ravit pas les syndicats.
100 millions d’économies en biologie, 300 millions en imagerie
Mais ce n’est pas tout. En cas d’absence de non-respect des objectifs ou de la trajectoire de l’accord, l’Assurance-maladie peut unilatéralement décider de baisses de tarifs. Les parties ont une possibilité de saisine ministérielle pour qu’un accord de maîtrise des dépenses soit conclu. À défaut, les ministres peuvent adopter par arrêté des mesures de baisses des tarifs pendant une durée de quatre mois. En l’absence d’accord sur les dépenses d’imagerie médicale au 30 avril 2025, l’Assurance maladie peut jusqu’au 30 juin procéder à des baisses de tarifs permettant d’atteindre le montant d’économies prescrit.
L’exécutif entend réaliser « au moins 300 millions d’euros » sur les dépenses d’imagerie sur les années 2025 à 2027. Et 100 millions pour la biologie médicale, comme négocié entre les médecins et la Cnam lors de la convention médicale, a rappelé Thomas Fatôme. Celle-ci a fixé comme objectif de réduire les remboursements d’examens biologiques « inutiles » en diminuant d’au moins 80 % le nombre de ces actes. En outre, le protocole signé le 27 juillet 2023 avec les quatre syndicats représentatifs des directeurs de laboratoire, pour la période 2024-2026, comporte également comme objectif de limiter des actes, comme le dosage de la vitamine D, l’obsolescence de la vitesse de sédimentation (VS) et les triples ou doubles dosages des hormones thyroïdiennes.
Pas de « manipulation » des chiffres
Remonté, le DG de la Cnam a saisi l’opportunité de cette apparition publique pour passer un message, visiblement adressé aux syndicats de biologistes, avec qui le conflit sur la baisse des tarifs de septembre est désormais instruit : « Faire croire que nous avons manipulé les chiffres… Ce n’est pas ainsi que nous travaillons ! » Avant de défendre le dialogue conventionnel et « les bases parfaitement transparentes » du protocole. « Si des secteurs d’activité se concentrent et font des gains de productivité, tant mieux, entre guillemets, si cela permet à la puissance publique de faire des gains économiques aussi ! Aujourd’hui, produire un B [acte de biologie médical remboursé par la Sécu, NDLR] est moins cher qu’il y a dix ans… Tant mieux ! », a-t-il également soutenu.
L’argument avancé dans le PLFSS est que les dépenses d’assurance-maladie en ville y sont très dynamiques (+6,5 % dans le secteur de la biologie, +8,5 % de volume dans le secteur de l’imagerie, forfait technique et actes d’imagerie). Ces deux secteurs sont aussi concernés par l’article 16. Le gouvernement souhaite étendre un dispositif d’accompagnement des prescripteurs, afin de s’assurer que les ordonnances entrent bien dans le cadre des recommandations de la HAS ou des règles de nomenclature. Sur ce point aussi, Thomas Fatôme a défendu, devant les sénateurs, le texte du gouvernement. Logique : il s’agit d’une proposition de la Cnam dans son rapport « Charges et produits » pour 2025.
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