« Nous fêtons un triste anniversaire : depuis 50 ans, la France n’a pas présenté de budget à l’équilibre. Le dernier budget à l’équilibre remonte à 1974. » Le ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Bruno Le Maire, a commencé par ces deux phrases cinglantes son discours devant la commission des finances de l’Assemblée nationale le 6 mars, preuve de sa volonté de marquer la gravité et l’urgence de la situation budgétaire.
La commission se réunissait en raison du décret d’annulation de crédits du budget de l’État pour 2024 à hauteur de dix milliards d’euros – le contexte géopolitique et le ralentissement de la croissance ayant dégradé brutalement la conjoncture budgétaire définie dans la loi de finances, votée deux mois auparavant.
50 % de la dépense publique relève de la sphère sociale
En 23 ans, a détaillé Bruno Le Maire devant les élus, les dépenses publiques ont plus que doublé pour atteindre 1 600 milliards d’euros en 2023, contre 760 milliards en 2000. Or, l’objectif affiché par Bercy est de revenir sous les 3 % de déficit dès 2027 et de construire une trajectoire d’équilibre des finances publiques pour 2032.
Se défendant de toute « purge », Bruno Le Maire a assumé sa stratégie consistant à « agir vite et fort » : d’abord avec la suppression des dépenses exceptionnelles de crise (liées au Covid ou à l’inflation), puis avec cette annulation de dix milliards d’euros de crédits en février par voie réglementaire (mission Travail, aide publique au développement, mission écologie…) et dès cette année avec plusieurs autres mesures de redressement à l’étude – la dépense publique étant composée de 50 % de dépense sociale, 30 % de dépense de l’État et 20 % de dépense des collectivités locales.
Haro sur les transports médicaux et l’absentéisme
Alors que la France dépense six points de PIB de plus que la moyenne des autres pays européens sur les prestations sociales, la santé et les retraites, le patron de Bercy a évoqué plusieurs secteurs où l’exécutif s’emploie à trouver des économies. « Est-il vraiment légitime et pouvons-nous encore nous permettre que nous remboursions l’intégralité des transports médicaux pour 5,7 milliards d’euros par an ? », a interpellé le ministre, confirmant une piste déjà lancée. Le ministre a évoqué dans la foulée sa promesse du remboursement des fauteuils roulants sur mesure, qui nécessite des crédits nouveaux.
Le ministre s’est aussi interrogé à haute voix sur la légitimité du nombre de jours d’absence parmi personnels des collectivités locales, soit « 17 par an », alors qu’il est de « 12 dans le privé et de dix dans les services de l’État ». En clair, l’absentéisme est dans le viseur avec de possibles mesures sur le remboursement des IJ et les jours de carence.
La question du financement a aussi été mise sur le tapis. « Est-il vraiment légitime et pouvons-nous encore nous permettre que notre protection sociale soit intégralement financée par ceux qui travaillent ? », a lancé Bruno Le Maire face aux députés, laissant libre cours aux interprétations. « À toutes ces questions, pour moi, la réponse est non », a-t-il ensuite répondu.
Revue de dépenses sur les ALD et les DM
Dans ce contexte dégradé, Bruno Le Maire a déjà préparé les esprits à un éventuel projet de loi finances rectificative (PLFR) « cet été si cela est nécessaire » et à des textes financiers 2025 (Budget et Sécu) nourris par les revues de dépenses publiques en cours.
Parmi ces revues de dépenses, au moins deux sujets concernent directement la santé : les dispositifs médicaux et les affections de longue durée (ALD), comme déjà évoqué par Frédéric Valletoux à l’Assemblée nationale. Dans un entretien au Quotidien ce jeudi, le DG de la Cnam Thomas Fatôme confirme qu’il y a « un travail d’évaluation et d’expertise du dispositif des ALD engagé du côté de l’État ».
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