Interpellé sur cette vive recrudescence d'une haine millénaire, le gouvernement annonce des mesures pour l'endiguer, à commencer par une régulation des réseaux sociaux, principaux responsables de cette soudaine épidémie. La tâche est ardue parce qu'il ne faut pas, en combattant l'intolérance, porter atteinte à la liberté d'expression, dont se réclament systématiquement les antisémites. Elle est également compliquée par les dissonances de l'opinion : on se bat au sujet de l'origine du mal et pour savoir, notamment, s'il vient de l'extrême droite ou de l'extrême gauche ; on exige en outre le droit de critiquer le gouvernemnt israélien dès lors qu'on se sent libre de brocarder celui de la France ; la parole étant libérée, on se complait dans le complotisme et on voit, dans le chef de l'Etat, le représentant des banques juives sous le prétexte qu'il a travaillé chez Rothschild.
Il s'agit de manœuvres dilatoires, toutes destinées à justifier l'antisémitisme au nom de quelque droit sacré à s'exprimer sans nuances, un peu comme on dénonce la pression fiscale ou l'autorité d'un Etat insuffisamment décentralisé. Pure hypocrisie : la haine anti-juive n'a aucune excuse, elle n'explique rien de ce que sont les juifs, citoyens comme les autres qui partagent les tares et vertus de tous les Français. En revanche, elle traduit un phénomène très dangereux pour la communauté nationale qui éclate en clans noyautés par l'intolérance à tout ce qui n'est pas soi-même, qu'il s'agisse des juifs, des musulmans, des immigrés, des Noirs, des riches ou des pauvres.
La liberté de détester
Il est toujours risqué d'aller chercher les ressorts profonds d'un phénomène, mais le mouvement des gilets jaunes, auto-imprégné de sa longue colère, ne semble pas éprouver beaucoup de sympathie pour tout ce qui ne porte pas de gilet jaune. Bien entendu, il s'affronte surtout aux forces de l'ordre, mais il crie son aversion pour l'Etat, pour la République et pour ses institutions. D'aucuns ont mis sur la table l'immigration, accusée, bien sûr, de leur voler des emplois ou de les empêcher d'en trouver. Ils sont en quelque sorte structurés pour rejoindre les vieilles cohortes antisémites qui existent depuis qu'il y a des juifs au monde, et ça fait longtemps. Même les réactions scandalisées de ceux qui rejettent toutes les formes de racisme risquent de donner de mauvaises idées aux anti-tout. Ah, mais c'est vrai ça : nos malheurs ne peuvent venir que des juifs bien qu'ils ne représentent au maximum que 0,7 % de la population française.
On a répété à l'envi que l'homme qui a agressé (verbalement) M. Finkielkraut était un salafiste. Personne n'a vu ses camarades gilets jaunes essayer de le calmer ou de l'éloigner. Ils sont dans la rue pour dénoncer, protester, éventuellement se battre contre la police, aucun être au monde dépourvu de gilet jaune ne trouvera grâce à leurs yeux. Certes, il n'a jamais été question, au sein du mouvement, d'intolérance à l'égard des juifs, mais on a vu de nombreux personnages appartenant à des groupes identitaires participer aux manifestations ; on a entendu parfois des propos antisémites ; il y a enfin, dans leur comportement irréductible, une souche de violence qui noiera les scrupules que pourraient nourrir ces défenseurs apparents de l'égalité.
Ils se prétendent pacifiques, ils ne sentent jamais responsables des dégradations infligées aux centres-villes, des blessés ou des morts. Façon très superficielle d'oublier qu'ils n'auraient aucun poids sans la violence qui accompagne leurs manifestations, que c'est elle qui maintient en vie leur mouvement et qui favorise maintenant la hausse des actes antisémites. Ils ne veulent pas de cette responsabilité mais ils la portent. Tout à coup, dans ce bouilllon de culture, l'injure et le crime deviennent routiniers, et c'est au nom de la liberté que l'on piétine le pays, l'ordre et les institutions.
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