L’EXISTENCE d’une plaie induit des modifications des mécanismes de la douleur, avec notamment une augmentation de l’influx nociceptif et un phénomène de sensibilisation. Ainsi, la douleur associée aux plaies altère fortement la qualité de vie. « Le paradoxe est que souvent le ressenti de la douleur par le patient est incompris, voire dénié », regrette le Dr Pascale Fouassier, avant de rappeler la définition de la douleur, qui est « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion existante ou potentielle… ». Il importe ainsi de cibler la prise en charge sur ces deux grands axes, sensoriel et émotionnel, en tenant compte, en outre, d’une des spécificités de la douleur liée aux plaies : son caractère répétitif.
L’évaluation, étape indispensable.
Une bonne évaluation de la douleur constitue une étape incontournable de sa prise en charge : Où ? Quand ? Comment ? Combien ? Sans oublier l’expression faciale et corporelle, particulièrement importante chez les sujets âgés ayant des difficultés d’expression verbale.
L’identification des mécanismes impliqués est également essentielle. Le mécanisme nociceptif est intrinsèque à la plaie, mais une origine neuropathique peut être associée. Le recours au questionnaire DN4 peut aider au diagnostic étiologique. Il faut bien sûr adapter les échelles d’évaluation au patient, en utilisant par exemple Algoplus en cas de difficulté de communication.
La prise en charge pharmacologique « classique », fait appel, dans les douleurs nociceptives, à un traitement de fond associé à une prémédication pour le pansement. « Nous disposons de beaucoup plus de ressources qu’auparavant, avec les antalgiques de palier 3 et notamment le fentanyl à libération immédiate, intéressant pour prévenir les accès douloureux paroxystiques lors des soins des plaies tumorales ou des escarres chez les patients adultes cancéreux, souligne le Dr Fouassier. Il ne peut être prescrit que chez les patients considérés comme tolérants aux morphiniques, et donc recevant ce type de traitement de fond depuis au moins une semaine ». Le citrate de fentanyl présente l’avantage de la variété des voies d’administration, sublinguale, gingivale, spray nasal, qui permettent une action rapide obtenue entre 10 et 20 minutes et durant une heure environ. « Cette cinétique est ainsi très adaptée à la réalisation d’un pansement, même complexe. Une titration est toutefois nécessaire, assez complexe en l’absence d’équivalence entre les formes galéniques », précise le Dr Fouassier. Au palier 2, le retrait prochain du dextropropoxyphène impose de prendre le relais avec d’autres molécules.
Les douleurs neuropathiques ne répondent pas aux antalgiques de paliers 1, 2 ou 3, et impliquent le recours aux antiépileptiques (gabapentine, prégabaline) et aux antidépresseurs, les tricycliques étant les plus efficaces, mais les moins bien tolérés. Moins classique, le MEOPA (Mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote) est tout à fait adapté à la prévention de la douleur induite par un geste. Son utilisation est limitée à 15 jours consécutifs, sur prescription médicale et après formation de l’utilisateur.
Les topiques.
Parmi les traitements topiques, les anesthésiques locaux soulagent rapidement, mais leur recours est limité par le problème du remboursement, le risque de toxicité cardiaque et d’allergie. L’utilisation de la crème anesthésiante Emla pose de son côté des problèmes d’organisation pratique. L’ibuprofène donne des résultats décevants et les corticoïdes locaux ne peuvent être envisagés que dans certains cas en raison du risque infectieux.
Quelques travaux prometteurs portent sur la morphine en topique. De même, l’anesthésie locorégionale bénéficie d’expériences intéressantes, comme celle du réseau charentais « SOS douleur à domicile », menée chez des patients ayant une artérite de stade 4 souffrant de douleurs rebelles aux morphiniques. La qualité des techniques de soins joue, bien sûr, un rôle majeur dans la prévention de la douleur induite. Enfin, les approches psychocorporelles sont en plein développement, telles que l’hypnose, qui a fait la preuve de son efficacité sur le stress et la douleur, la sophrologie, la relaxation ou la musicothérapie.
* D’après la communication du Dr Pascale Fouassier, hôpital Charles-Foix, Ivry-sur-Seine.
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