« À NOTRE CONNAISSANCE, c’est la première étude d’investigation sur l’association à long terme entre l’importance du tabagisme à l’âge moyen de la vie et le risque de démence, de maladie d’Alzheimer (MA) et de démence vasculaire (DV) plus tard au cours de la vie, dans une grande cohorte multiethnique. »
Ont été analysées les données prospectives d’une cohorte de population comprenant 21 123 volontaires pour un examen de santé complet, avec un recueil de données sur les habitudes de vie et l’histoire familiale (Multiphasic Health Care Checkup, mené en Californie). L’âge moyen lors de l’examen initial est de 58 ans.
Les examens ont été menés entre 1978 et 1985. Les diagnostics de démence, de MA et de DV ont été portés avec fiabilité, en médecine interne, en neurologie et en neuropsychologie, entre 1994 et 2008.
Au total, un diagnostic de démence a été porté chez 5 367 personnes (25,4 %), dont 1 136 cas de MA et 416 cas de DV, au cours du suivi qui est en moyenne de vingt-trois ans.
Les résultats font apparaître que le risque de démence, de MA et de DV est dose-dépendant, c’est-à-dire qu’il augmente en parallèle avec la quantité de cigarettes fumées.
PLus de 2 paquets par jour.
Les très gros fumeurs, ceux qui ont rapporté fumer plus de deux paquets par jour à l’âge moyen de la vie, sont ceux qui ont le risque de démence le plus élevé des décennies plus tard.
Les résultats sont calculés après de multiples ajustements et sont donc indépendants de : l’âge, du genre, de l’éducation, de l’ethnie, du statut conjugal, de l’HTA, d’une hyperlipidémie, de l’indice de masse corporelle, du diabète, des affections cardiaques, des AVC et de la prise d’alcool.
Les risques sont calculés comparativement à des non-fumeurs, servant de référence (risque relatif de 1).
Ainsi, le risque de démence est très accru chez ceux qui fument 2 paquets par jour ou plus. Le risque relatif pour ces personnes est de 2,14 ; il est de 1,44 pour ceux qui fument entre 1 et 2 paquets, de 1,37 pour 0,5 à un paquet. Un tabagisme antérieur ou inférieur à 0,5 paquet n’exerce pas d’effet et le risque de démence est similaire à la normale.
Pour la MA, chez les fumeurs de 2 paquets ou plus, le risque relatif est de 2,57, il est de 1,18 entre 1 et 2 paquets, tandis qu’il est un peu accru, mais non significativement, pour les fumeurs de 0,5 à un paquet (RR 1,11).
Malgré le plus faible nombre de cas, une augmentation du risque de DV est aussi détectée. Le risque relatif de DV est de 2,02 au-delà de 2 paquets par jour. Après ajustement pour des facteurs vasculaires potentiellement confondants, le RR est de 2,72, soit pratiquement 3 fois celui des non-fumeurs.
L’augmentation du RR est à la limite de la significativité pour ceux qui fument entre un et 2 paquets quotidiens (RR 1,42). Le risque de présenter une DV n’est pas augmenté significativement chez les anciens fumeurs (RR 0,99), ceux qui consomment moins de 0,5 paquet par jour (RR 1,05), ou entre 0,5 et 1 paquet par jour (RR 1,20). Jusqu’ici, la relation entre le tabagisme et la DV a été moins étudiée que pour la MA.
Un effet direct sur le cerveau.
Le tabagisme est un risque bien documenté d’AVC. Et il peut aussi prédisposer à une démence par multi-infarctus cérébraux. Mais il est important de noter que dans cette étude, les ajustements réalisés pour les facteurs vasculaires et les AVC montre que le tabagisme semble donc exercer un effet direct sur le cerveau, soulignent les auteurs.
On sait que le tabagisme augmente le stress oxydatif et l’inflammation, qui sont des facteurs en cause dans la physiopathologie de la MA.
« Il est possible que le tabagisme affecte le développement des démences via des voies neurodégénératives et vasculaires. » Aucune interaction n’est trouvée entre le tabagisme et le genre ou l’origine ethnique.
Peu d’études avaient auparavant recherché l’effet du tabagisme aux âges moyens de la vie sur les démences. On trouve seulement 3 études de cohortes avec des effectifs de taille plus réduite et principalement des participants caucasiens. Ces derniers résultats sont concordants avec ceux de deux d’entre elles.
Minna Rusanen et coll. Archives of Internal Medicine, en ligne le 25 octobre 2010.
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