DANS LA DÉPENDANCE aux opiacés, les sujets concernés sont peu enclins à rechercher un traitement. Quand ils sont traités, ils adhèrent faiblement aux traitements et les rechutes sont fréquentes. Les traitements par agonistes, telle la méthadone (agoniste des récepteurs mu) ou la buprénorphine (agoniste partiel), occupent une place importante contre la dépendance aux opiacés avec comme objectifs une réduction de l’usage des produits illicites, une réduction du taux de conversion et une amélioration de la morbi-mortalité. Mais ils ne sont pas toujours utilisables pour des raisons variées (disponibilité, raisons professionnelles [métiers qui empêchent l’utilisation de tels produits], philosophiques [préférence pour un traitement sans effet opiacé], addictions récentes…).
Un traitement alternatif, permettant l’obtention d’une abstinence est la naltrexone, un antagoniste des récepteurs mu, sans effet agoniste opioïde. Ne provoquant ni euphorie ni sédation, la naltrexone n’est pas addictogène et donc ne cause pas de symptôme de manque à l’arrêt. Une forme de longue durée d’action a été développée et approuvée aux États-Unis et en Russie, d’abord pour la dépendance à l’alcool, puis pour celle aux opiacés. Administrée à raison d’une injection intramusculaire mensuelle, la naltrexone est lentement libérée à partir de microsphères d’un polymère utilisé pour les sutures chirurgicales. Chez les patients dépendants à l’alcool, la naltrexone réduit l’incidence des comportements de forte imprégnation éthylique et accroît le taux d’abstinence totale.
Un effet antimanque précoce.
Dans le cadre de la dépendance aux opiacés, une étude russe publiée dans « The Lancet » (Eugeny Krupitsky et coll., Saint-Pétersbourg) sur l’utilisation de la naltrexone dans la dépendance aux opiacés, a été menée sur 250 patients de plus de 18 ans. Ils ont eu une désaccoutumance au produit d’addiction pendant 30 jours au moins à l’hôpital et une abstinence réelle pendant au moins une semaine. Ils ont reçu soit de la naltrexone à effet prolongé (une injection mensuelle pendant quatre mois), soit un placebo. De cette étude, il ressort que la proportion de semaines d’abstinence est de 90 % dans le groupe naltrexone versus 35 % dans le groupe placebo : un résultat favorable pour le traitement naltrexone dont l’efficacité ne semble pas dépendre de l’âge du patient ni de la durée à la dépendance aux opioïdes. Un effet antimanque persistant apparaît précocement dès la première semaine. Une épreuve par la naloxone entraîne une rechute par dépendance physiologique chez 17 patients du groupe placebo contre un seul du groupe naltrexone.
Cette étude, dont une partie des données a été utilisée pour l’approbation par la FDA, comporte des limites : 54 % des patients inclus n’ont pas terminé le protocole et seulement un peu plus de ????ceux sous naltrexone ont reçu l’intégralité du traitement prévu. Des commentateurs soulignent que cette étude est « éthiquement discutable quand il existe un traitement standard », et sont étonnés de l’utilisation des données par la FDA pour l’approbation du produit dans le traitement de la dépendance aux opiacés. Quant aux auteurs, ils indiquent que la naltrexone pourrait avoir une place en complément des agonistes existants.
The Lancet 28 avril 2011, doi : 10.1016/40-6736(11)60358-9.
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