LA COCAÏNE, les amphétamines et l’ecstasy ont toutes pour principal effet cardiovasculaire délétère d’induire une stimulation importante du système nerveux sympathique. Celle-ci provoque à des degrés divers une tachycardie et une vasoconstriction dont l’expression clinique varie en fonction de la dose ingérée et d’une éventuelle pathologie sous-jacente. La notion d’infarctus myocardique après prise de cocaïne est bien admise, mais des lésions non ischémiques sont attestées par des travaux expérimentaux et une myocardite est constatée dans 20 % des cas dans des séries autopsiques. Au-delà de ces considérations bien admises, la consommation de cocaïne a été également mise en cause dans un quart des infarctus myocardiques non fatals chez les moins de 45 ans et, par des études toxicologiques systématiques, dans 3,1 % des morts subites.
La seconde drogue illicite la plus consommée en Europe.
Or, comme le rappellent les autorités françaises, à la différence du crack, consommé principalement par les populations les plus marginalisées, la consommation de cocaïne ne se cantonne pas à des cercles « branchés » ou à des populations spécifiques, comme le cadre qui a un usage contrôlé et ponctuel et le toxicomane désocialisé : toutes les catégories sociales sont concernées. La cocaïne était ainsi en 2009 la seconde drogue illicite la plus consommée en Europe après le cannabis. La prévalence de sa consommation dans la population générale chez les 15 à 64 ans y est de 3,9 % pour toute la vie et de 1,2 % sur l’année écoulée, essentiellement chez les 15-34 ans de sexe masculin.
GD Aquaro et coll. (Pise, Italie) ont donc entrepris de chercher à évaluer la prévalence et les caractéristiques cliniques de toxicité cardiaque de la cocaïne chez des cocaïnomanes asymptomatiques indemnes de tout antécédent de cardiopathie. Pour cela, les auteurs ont entrepris une étude prospective qui a porté sur 30 cocaïnomanes (dont 25 hommes) âgés de 39 ± 7 ans en moyenne qui commençaient une désintoxication. Les patients qui avaient des antécédents d’insuffisance coronaire, de valvulopathie ou d’atteinte péricardique ou myocardique, quelle qu’en soit l’étiologie, ont été exclus de l’étude. Un bilan clinique et humoral a été pratiqué, ainsi qu’une échocardiographie, une épreuve d’effort, un électrocardiogramme de longue durée selon la méthode de Holter et une imagerie par résonance magnétique (IRM).
Des anomalies à l’IRM dans plus de 80 % des cas.
Des anomalies électrocardiographiques de repos ont été mises en évidence chez 15 sujets. L’épreuve d’effort et le Holter n’ont permis de détecter aucun événement ischémique ou rythmique. L’échocardiographie, quant à elle, a permis de mettre en évidence des anomalies de la cinétique pariétale ventriculaire gauche chez 12 sujets. Concernant l’IRM, enfin, des anomalies myocardiques ont été mises en évidence chez 25 sujets, soit 83 % de l’effectif de l’étude. Il s’agissait d’un œdème dans 14 cas (47 % des patients) et d’une fibrose chez 22 sujets (soit 73 % de la population de l’étude). Chez 11 sujets, soit 37 % des patients, l’œdème et la fibrose coexistaient, le plus souvent (dans 9 cas sur 12) aux mêmes sites. La fibrose est considérée par les auteurs comme une conséquence de l’exposition ancienne à la cocaïne, l’œdème étant observé en cas de consommation récente. L’IRM est devenue un examen de choix pour rechercher l’étiologie d’une dysfonction myocardique inexpliquée. Il est en effet possible de distinguer la fibrose ischémique de celle qui ne l’est pas. Dans l’étude de GD Aquaro et coll., la fibrose constatée chez les cocaïnomanes est apparue non ischémique chez 15 patients sur 22.
Ainsi, come le montre l’IRM, la prévalence des lésions cardiaques est élevée chez les cocaïnomanes asymptomatiques. La série étudiée est évidemment limitée et les résultats de cette étude devraient être confirmés. Dans l’hypothèse où ils le seraient, une détection des anomalies cardiaques pourrait s’avérer nécessaire chez les cocaïnomanes au long cours, même asymptomatiques.
Aquaro G. D., et coll. Silent myocardial damage in cocaine addicts. Heart 2011 [en ligne]. doi:10.1136/hrt.2011.22697.
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