C’EST DANS la revue « Canadian Medical Association Journal » (1) que Sonal Singh et coll. publient leur analyse de 14 essais randomisés en double aveugle et contrôlés. Ces essais, qui portaient sur des sujets fumeurs ou utilisant du tabac non fumé, rapportaient des événements cardio-vasculaires. D’une durée de 7 à 52 semaines, ils ont inclus au total 8 216 participants. Singh et coll., pour leur méta-analyse, ont pris comme critère principal tout événement adverse ischémique ou arythmique (infarctus du myocarde, angor instable, revascularisation coronarienne, maladie coronarienne, arythmie, accident ischémique transitoire, AVC, mort subite ou insuffisance cardiaque congestive) rapporté dans les essais. La mortalité toutes causes constituait le critère secondaire. Résultats de Singh et coll. : « La varénicline était associée à une augmentation significative du risque d’événements cardiovasculaires sérieux par rapport au placebo » : 1,06 % (52/4 908) versus 0,82 % (27/3 308), soit un OR de 1,72. Par ailleurs, il y avait trop peu de décès pour permettre une comparaison en terme de mortalité.
Dans un communiqué, le Laboratoire Pfizer émet des réserves sur la solidité de cette méta-analyse de Shing et coll. « Ces réserves, parmi d’autres, portent sur le bien-fondé de la mesure du risque cardio-vasculaire, ou critère composite, qui associe des événements qui ne partagent pas de cause biologique commune ; sur la manière dont les événements cardio-vasculaires sont comptabilisés et classés ; et sur le petit nombre d’événements à partir desquels les auteurs tirent leurs conclusions. » La différence de 72 % rapportée dans l’analyse de Singh mérite aussi d’être replacée dans un contexte approprié, poursuit Pfizer. La différence du taux d’événements cardiovasculaires rapportés dans cette analyse était de moins d’un quart de pour-cent (1,06 avec la varénicline versus 0,82 % avec le placebo). « Les données actuellement disponibles sur la sécurité de Champix, incluant une analyse des données poolées sur 7 375 personnes essayant de cesser de fumer, ne supportent pas une augmentation du risque cardio-vasculaire associé à Champix », ajoute le communiqué. Pfizer discute actuellement avec la FDA américaine d’un protocole pour la mise en place d’une méta-analyse des données des essais cliniques de Pfizer pour aider à mieux évaluer la sécurité cardiovasculaire de Champix. Cette méta-analyse répondra à certaines limitations de l’analyse de Singh ; Pfizer espère qu’elle sera basée sur un critère composite plus solide pour mesurer le risque cardiovasculaire aussi bien qu’un processus validé pour classer ou juger les événements cardio-vasculaires qui font partir de l’index composite.
Un enjeu de santé publique.
« Le sevrage tabagique est un enjeu de santé publique car le tabac tue en France plus de 66 000 fumeurs par an », rappelle le Dr Isabelle Pithois-Merli, directeur médical de la BU Primary Care de Pfizer. Il faut, précise-t-elle, souligner le très faible taux d’événements observés dans cette méta-analyse (1,06 % sous varénicline et 0,82 % sous placebo), avec une faible augmentation du risque (0,24 %), comparé au risque majeur lié au tabagisme. Le Dr Pithois-Merli souligne certains biais dans la méta-analyse de Singh, notamment : le taux de perdus de vue est beaucoup plus élevé dans le groupe placebo que dans le groupe varénicline (ce qui diminue le nombre des effets observés dans le groupe placebo) ; 9 des études présélectionnées dans la méthodologie ont finalement été exclues de la méta-analyse « car ne comportant pas d’événements cardio-vasculaire sérieux... ». « Pour quelle raison ?, s’interroge le Dr Pithois-Merli. Cela n’est pas précisé... D’un point de vue purement mathématique, cette exclusion peut augmenter le taux d’événements. » Autre biais : la méta-analyse n’a pas été réalisée avec l’accès aux données individuelles des patients. Par ailleurs, précise le Dr Pithois-Merli, « Pfizer travaille actuellement directement avec la FDA sur le protocole d’une méta-analyse destinée à évaluer précisément la tolérance cardiovasculaire de la varénicline. Nous tiendrons compte de tous les biais potentiels de l’étude de Singh pour réaliser l’étude la plus appropriée pour répondre à toutes les questions que laisse en suspens cette publication ». Il faut rappeler que la varénicline vient d’obtenir son renouvellement d’AMM européenne pour cinq ans sur la base de toutes les données cliniques actuellement disponibles. « Cette décision a ratifié l’avis positif du CHMP qui a considéré que le rapport bénéfice/risque global de la varénicline restait positif », conclut le Dr Pithois-Merli.
(1) CMAJ 2011.DOI:10.1503/cmaj.110218.
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