Plus de 20 % des Français ignorent encore les risques de l’alcoolisation fœtale. Un quart des femmes enceintes consomment de l'alcool. Soit 200 000 femmes concernées chaque année. Beaucoup pensent que seule la consommation quotidienne est toxique. Bref, le message n'est pas totalement passé.
C'est pourquoi l'Académie de médecine, dans un rapport adopté fin mars coordonné par les Pr Gilles Crépin et Gérard Bréart, appelle à une politique plus ambitieuse.
Ce rapport recommande en particulier : d'intensifier la communication et l'éducation à l'attention du grand public, des personnels de santé et des enseignants ; d’améliorer la signalisation sur les bouteilles d'alcool avec un logo plus visible et plus explicite ; de soutenir et développer la recherche afin de préciser la place des nouveaux marqueurs biologiques très efficaces pour détecter les signes d'imprégnation alcoolique chez la femme enceinte et le nouveau-né. Le mot d'ordre est « Tolérance zéro alcool pendant la grossesse », résume le Pr Crépin.
Le SAF, face émergée de l'iceberg
En France, le Syndrome d’Alcoolisation Fœtale (SAF) au sens large concernerait au moins 1 % des naissances. Soit environ 8 000 nouveau-nés par an. Le SAF complet n'est en effet que la partie émergée de l'iceberg. L'alcoolisation fœtale induit aussi des troubles cognitifs, du comportement et de mémorisation s'exprimant plus tard, durant l'enfance, l'adolescence, voire la vie adulte.
« L'alcool touche spécialement l'hippocampe avec un effet sur la mémorisation, les addictions, le comportement avec, à l'âge scolaire, des troubles d’apprentissage, de mémorisation, une dyscalculie, une hyperactivité, etc., explique le Pr Crépin. En l’absence de tout traitement curatif, la prévention est la seule solution ».
De nouveaux outils de dépistage et prévention
« L'alcoolisation fœtale doit être considérée, au même titre que le diabète gestationnel et l’hypertension gravidique, comme une maladie chronique qui impose chez la mère une surveillance, des contrôles et des dosages biologiques », propose le rapport.
Le dépistage aurait alors toute sa place. Un auto-questionnaire, bien validé, pourrait compléter la consultation du 4e mois. On a par ailleurs des marqueurs biologiques modernes permettant d'évaluer l'imprégnation alcoolique chronique des femmes enceintes (sang, urine, et surtout cheveux) mais aussi du nouveau-né (méconium). Deux marqueurs des métabolites de l'éthanol font consensus (SOHT juin 2014) : l'éthyl glucuronide (EG) et les esters éthyliques d’acides gras (FAEEs). Il faut, à l'avenir qu'en France on s'attache à préciser leur place dans le suivi des femmes enceintes.
D'après un entretien avec le Pr Gilles Crépin, CHRU de Lille, Académie de médecine
Gilles CREPIN, Gérard BREART, L’alcoolisation fœtale. Rapport. Académie de médecine, séance du 22 mars 2016
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