UNE FOIS encore, une inégalité entre les femmes et les hommes est confirmée. En défaveur de celles-là. Le tabac fait une différence entre les sexes quand il s’attaque aux coronaires. Les artères féminines y sont davantage sensibles. La majoration du risque de cardiopathie d’origine coronarienne est réelle chez les fumeuses, par rapport aux fumeurs. Cette atteinte avait déjà été suspectée par des études antérieures, mais il manquait des chiffres probants.
Ils s’y sont mis à deux, Rachel R. Huxley et Mark Woodward (appartenant à des universités américaines et australienne) pour réaliser une vaste métaanalyse de 86 essais prospectifs menés de janvier 1966 à décembre 2010. Soit un total de plus de 3,9 millions d’individus et de 67 075 événements coronariens. Avant d’en aborder les résultats, l’importance des conclusions de ce travail est suggérée par quelques données chiffrées. Il existe 1,1 milliard de fumeurs dans le monde, dont 20 % de femmes. Annuellement 5 millions de décès sont attribués au tabac dont 1,5 million chez des femmes. Une projection à 2030 donne, pour les femmes 8 millions de consommatrices et 2,5 millions de décès. L’intérêt d’apprécier la majoration du risque qu’elles encourrent « saute aux yeux ».
2 % par année supplémentaire.
Indépendement des autres facteurs de risque cardiovasculaire, la forte poussée du tabagisme féminin, montre un surrisque de 25 % pour les fumeuses par rapport aux fumeurs. Un calcul plus poussé a été réalisé évaluant le rapport des risques relatifs (RRR) en ajustant la comparaison fumeuse-fumeur par rapport aux non-fumeurs : il est calculé à 1,25. Ce RRR augmente de 2 % par année supplémentaire de suivi. Une bonne nouvelle quand même, en cas d’arrêt du tabac la différence de risque entre les sexes disparaît, de même que le RRR qui devient proche de 1 (0,96).
Les deux auteurs se montrent insuffisamment satisfaits de leurs résultats. Ils pensent avoir sous-estimé le risque des fumeuses pour trois raisons. La première est que dans leur étude mondiale, l’Asie compte moins de 10 % de fumeuses. Ensuite, les gros consommateurs se comptent davantage parmi les hommes que chez les femmes. Enfin, ces dernières ont plus tendance à sous déclarer leur consommation.
Ils jugent que la force de leur travail porte sur l’énorme taille de la population et sa diversité. Mais ils l’estiment limitée par le manque de données sur l’intensité et la durée du tabagisme ainsi que sur l’utilisation d’une contraception orale. Enfin, ils n’ont pu faire la différence entre non-fumeurs vrais et ex-fumeurs.
Pour l’instant, il est difficile de préciser le mécanisme qui sous-tend cette différence. Une hypothèse pourrait se fonder sur une plus grande extraction de carcinogènes et autres toxiques par les fumeuses, à nombre de cigarettes égal.
La conclusion des deux chercheurs est que si, bien sûr, il faut continuer à encourager le sevrage, des actions visant spécifiquement les femmes semblent nécessaires.
Lancet 2011 ; 378 : 1297-1305.
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