DE MULTIPLES FACTEURS freinent encore le développement des politiques d’éducation à la santé de la population. D’après Jean-Michel Chabot, professeur de santé publique, « les pays développés, comme le nôtre, ont toujours fait primer le curatif et l’innovation technologique au détriment des approches préventives. Le programme pédagogique de l’internat, par exemple, ne prévoit pas d’enseignement de soins préventifs. » En France, les moyens mis en œuvre pour permettre l’accès des femmes enceintes à la prévention et au sevrage tabagique restent également insuffisants. Comme en témoigne Pr Michel Delcroix, président et fondateur de l’association APPRI-Maternité sans tabac : « D’après notre enquête récente, moins de 20 % des maternités françaises sont équipées d’un analyseur de monoxyde de carbone, mesure permettant notamment de déceler un éventuel manque d’oxygénation du cerveau du bébé dont la mère est fumeuse. De plus, les traitements substitutifs à la nicotine sont prescrits dans moins d’une maternité sur 10. Car ils ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale. Les futures mamans, qui ont le plus besoin de ces traitements, ne sont donc pas prises en charge. Une situation incroyable pour un pays développé comme la France. »
Il faudrait, au contraire, mieux prendre en charge, accompagner et associer les femmes enceintes au dépistage et à la lutte contre le tabagisme. « Nous devons compter sur le poids institutionnel des patientes qui souhaitent, de plus en plus, bénéficier d’actions de prévention. Et encourager les associations de patients : ils font peser sur les professionnels de santé une exigence qui se traduira, pour partie, en prévention et en éducation à la santé », estime le Pr Chabot.
Rémunération.
Autre élément moteur : inciter les professionnels de santé à faire de l’éducation à la santé en finançant clairement le temps qu’ils y consacrent. « Les politiques de prévention doivent être rémunérées en dehors de l’acte. D’ailleurs, les médecins libéraux ne sont plus uniquement payés à l’acte, mais aussi à la performance et par le biais d’un paiement forfaitaire. Ce qui leur permettra de déployer davantage d’actions de prévention », indique le Pr Chabot.
De son côté, Jean-Paul Segade, directeur général de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM) se veut confiant pour l’hôpital et ses maternités. « Malgré le plan de retour à l’équilibre et la recherche d’économies pour notre système de santé, la loi HPST (Hôpital, patients, santé et territoires) nous ouvre de nouvelles possibilités pour favoriser les politiques de prévention : les Agences régionales de santé (ARS) devraient inciter les directeurs d’hôpitaux à mettre en place des actions dans ce sens. Par ailleurs, la constitution des communautés hospitalières de territoire permettra aux établissements qui se constituent en hôpital de territoire de développer ensemble des actions de prévention. Enfin, la mise de contrats d’objectifs et de moyens au sein des pôles nous obligera à créer des indicateurs de qualité. Et donc, à décliner, au sein de chaque pôle, un volet prévention et d’éducation à la santé. »
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