GRÂCE À des travaux menés chez des rats in vivo, il devient possible de comprendre l’état d’euphorie que procure l’alcool. Des doses légères à modérées, Christina Gianoulakis et coll. (Canada) insistent sur ce point, favorisent la production de bêta-endorphines dans l’aire tegmentaire ventrale (ATV). Ce qui confirme et surtout précise un fait fortement soupçonné : l’alcool semble bien agir sur la synthèse des opioïdes endogènes (endorphines, enképhalines et dynorphines).
L’équipe a injecté à des rats mâles soit de l’eau salée, soit de l’alcool à diverses doses (0,8 ; 1,2 ; 1,6 ; 2 et 2,4 g/kg). Le travail diffère des expérimentations antérieures en ce sens qu’il mesure les taux des opioïdes endogènes sur des rongeurs menant leur vie « normale » d’animaux en cage. Et non sur des prélèvements. La technique utilisée est dite de microdialyse in vivo.
Les circuits de la récompense activés.
Ainsi, les auteurs ont constaté que des quantités d’alcool faibles à modérées favorisent la libération, dans l’ATV, de bêta endorphine et non des autres molécules (enképhalines et dynorphines). Par le biais de la dopamine, l’endorphine active les circuits de la récompense. C’est ainsi que « consommé avec modération », l’alcool donne une douce euphorie, apaise l’anxiété et procure une impression de bien-être général. Attention, prévient C. Gianoulakis, en dépassant ce seuil apparaissent au contraire sédation, effet hypnotique et majoration de l’anxiété.
Les endorphines seraient donc le principal responsable de l’effet « planant » de l’alcool. Rien d’étonnant puisque ces peptides naturels miment au mieux les propriétés pharmacologiques de la morphine.
Au-delà de cette explication, le travail américain permet de mieux comprendre l’action de la naltrexone dans le sevrage alcoolique. La bêta endorphine semble jouer un rôle dans la dépendance à l’alcool, or le médicament agit justement comme un antagoniste des récepteurs aux opioïdes. L’étude offre aussi une piste de réflexion sur de nouveaux traitements. Au lieu de bloquer de façon non spécifique ces récepteurs, il pourrait être plus efficace de cibler les endorphines de l’AVT.
Les auteurs tirent une seconde conclusion, plus pratique. Ils suggèrent aux individus chez qui une consommation modérée ne crée par l’euphorie attendue (absence de libération d’endorphines) de ne pas augmenter les doses. Ils n’aboutiraient qu’à une anxiété et une dépression.
Alcoholism : Clinical & Experimental Research, édition avancée en ligne.
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