LORSQUE Wynder et Graham ont publié leur travail, la mortalité par cancer pulmonaire avait été multipliée par 4 en trois décennies, et suivait en parallèle un accroissement dans les mêmes proportions de la consommation de cigarette, qui était survenu vingt ans auparavant, remarque Peter Bach dans un commentaire très actuel de cette publication historique.
Les deux auteurs des années 1950 indiquent que le cancer pulmonaire est devenu le premier cancer masculin et présentent l’étude de 684 patients souffrant de cette pathologie. Leur histoire vis-à-vis du tabac a été comparée à celle de différents groupes des témoins, y compris des sujets hospitalisés pour d’autres cancers. Ils ont mené une investigation attentive de l’histoire des individus par rapport au tabac (âge de début, quantité moyenne fumée, cigares, cigarettes…) et contrôlé les variables confondantes. Ils concluent prudemment : « La tentation est grande d’incriminer un tabagisme excessif et en particulier par cigarettes, pendant une période prolongée, en tant qu’un des facteurs primordiaux à l’origine de l’augmentation drastique des carcinomes bronchiques ».
La communauté scientifique longue à convaincre.
Une conclusion en forme d’euphémisme dans notre vision actuelle. Il faut se rappeler que le lien causal n’avait pas été formellement établi, même si déjà en 1952, un article de la très populaire revue « Reader’s Digest » évoquait le rôle des cigarettes dans le cancer pulmonaire. La communauté scientifique a été longue à convaincre. Pour la petite histoire, sept ans après sa publication, Evarts Graham déclarait un cancer pulmonaire bien qu’ayant cessé de fumer cinq ans auparavant.
Peter Bach salue la qualité de l’étude de Wynder et Graham et tout le crédit que leur soigneuse méthodologie permet d’accorder à ce travail.
C’est le rapport du Mninistre de la Santé en 1964 « Smoking and Health » qui date le moment où le lien entre tabagisme et cancer a été totalement accepté. « Smoking and Health » passait en revue les nombreux effets délétères du tabac.
Les mesures de contrôle.
Depuis, évidemment, des progrès très importants ont été accomplis. « Mais il reste encore de la place pour les individus qui concluent que la science n’a pas influé suffisamment sur les politiques de la santé », souligne le commentateur contemporain. « Les mesures de contrôle du tabac demeurent des moyens essentiels de santé publique, dont certains ne sont pas encore totalement déployés. » La « Frame work Convention on Tobacco Control », traité mis en place par l’OMS, articule un grand nombre de stratégies pour réduire l’imprégnation des populations par le tabac : mesures de prix pour les individus et de taxes pour les fabricants, éducation, communication, contrôle des ventes frauduleuses et de la vente aux mineurs. Les programmes doivent aussi s’assurer que les fumeurs actuels et potentiels ont une facilité d’accès aux aides de sevrage et des incitations financières à éviter la cigarette. Ce traité sur le contrôle du tabac a été signé par 168 pays, mais les États-Unis ne l’ont pas encore fait.
JAMA, 4 février 2009, vol 301, n° 5, pp. 539-541 ; et 27 mai 1950, vol 143, n° 4, pp. 329-336.
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