EN EUROPE et aux États-Unis, plus de 50 % des femmes enceintes prennent des antalgiques mineurs pendant la grossesse : paracétamol, aspirine ou ibuprofène.
Par ailleurs, on connaît une décroissance de la fertilité masculine dans les pays industrialisés au cours des décennies récentes. Différents auteurs ont recherché un lien. Le travail publié par des chercheurs danois, finlandais et français ajoute des arguments convergents.
Kristensen, Leffers et coll. ont réalisé une étude prospective dans les cohortes des naissances au Danemark et en Finlande : 2 297 femmes enceintes ont répondu à des questions précises portant sur leur mode de vie et leurs prises d’antalgiques mineurs.
Les résultats suggèrent que l’utilisation de ces antalgiques mineurs est associée à la survenue de cryptorchidie congénitale d’une manière dose-dépendante.
Le risque relatif de cryptorchidie chez un garçon dont la mère a pris de l’aspirine ou de l’ibuprofène est de 1,43. Quand les mères ont utilisé plus d’un médicament antalgique, l’augmentation de prévalence des cryptorchidies devient significative, avec un risque relatif ajusté qui atteint alors 7,55 (p = 0,007).
C’est pendant le deuxième trimestre de la grossesse que le risque est le plus important : le RR ajusté est de 2,3 (p = 0,032) ; il atteint 16,1 (p = 0,0001) chez les femmes prenant plus d’un antalgique. Le risque est significatif pour l’ibuprofène et l’aspirine, il suit la même tendance mais sans être significatif pour le paracétamol.
Les femmes qui prennent un antalgique AINS pendant plus de 2 semaines pendant le premier ou le deuxième trimestre de la grossesse ont un RR ajusté de 2,47 (p= 0,045).
Une action anti-androgénique.
Rappelons que la cryptorchidie est l’un des facteurs majeurs de stérilité masculine par réduction du sperme ; c’est aussi un facteur de risque du cancer testiculaire, qui, actuellement, tout comme les malformations du système reproducteur, tend à augmenter.
Les AINS auraient cet effet par action anti-androgénique, qu’ils exercent via une inhibition de la synthèse des prostaglandines.
Un travail d’un co-auteur français conforte les résultats. Bernard Jégou (Inserm U625, Rennes), confirme sur des cultures de cellules testiculaires fœtales de rats l’existence d’une réduction de la production de testostérone sous l’effet de ces antalgiques, tout en précisant bien qu’il s’agit d’une association et non d’une relation de cause à effet.
Les Danois ont donné de fortes doses d’un de ces antalgiques à des rates en gestation et observé des anomalies correspondant à une réduction de la sensibilité à la testostérone.
Les réponses aux questionnaires montrent aussi que de nombreuses femmes ne considèrent pas ces analgésiques courants comme de vrais médicaments.
Human Reproduction, 8 novembre 2010, publication en ligne avancée. Doi : 10.1093/humrep/deq323
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