Le Comité national contre le tabagisme (CNCT) s’alarme de la popularité croissante des sachets de nicotine, improprement appelés snus, au moment où plusieurs célébrités issues du monde du sport font la promotion de ce mode de consommation de la nicotine réputé « sans danger ».
Dans une mise au point, le comité dénonce une « confusion entretenue par l’industrie du tabac » destinée à « tromper le consommateur et espérer infléchir les réglementations autour des produits du tabac ». Originaire de Suède, le snus se présente sous la forme de petits sachets de tabac humides à sucer aromatisés. Ce produit est interdit dans le reste de l’Union européenne, donc en France, mais reste commercialisé en Asie, en Afrique et aux États-Unis.
En France, ce sont des petits sachets contenant une poudre blanche à la nicotine qui sont vendus par des entreprises comme Aroma King. Appelé à tort snus, il ne s'agit pas de tabac mais ce produit fortement dosé est à même d'entraîner rapidement une addiction. Dans les deux cas, le sachet est placé entre la gencive et la lèvre.
Les sachets de nicotine à sucer sont vendus en France sans déclaration préalable. « Les fabricants profitent d’un flou juridique autour des nouveaux produits de la nicotine, estime le CNCT. En effet, depuis mai 2016, date d’entrée en vigueur de la directive européenne 2014/40/UE sur la fabrication, la présentation et la vente des produits du tabac et produits connexes, les fabricants des produits du tabac et du vapotage ont l’obligation de déclarer certaines informations relatives à la composition, aux émissions, à la toxicité ou encore au volume de ventes de leurs produits avant de les commercialiser à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation (Anses). » Comme ces sachets à la nicotine ne sont ni du tabac ni du vapotage, aucune information les concernant n'est donc disponible sur le site de l’Anses.
Un produit avec ses propres risques
Le CNCT rappelle que ces nouveaux produits comportent des risques spécifiques. Pour le tabac sans fumée, catégorie à laquelle le snus appartient, la Société américaine de cancérologie a ainsi estimé qu'il expose ses utilisateurs à « plus de 25 produits chimiques connus pour favoriser l'apparition de cancer » (bouche, langue, joue, gencives, œsophage pancréas) ou a minima de leucoplasies, le composé le plus dangereux étant les nitrosamines spécifiques au tabac (niveaux et dangerosité variables d'un produit à l'autre).
Quant aux sachets de nicotine, ils contiennent jusqu’à 20 mg de nicotine, contre 1 à 3 mg pour une cigarette classique. « Cette caractéristique signifie une entrée très rapide dans la dépendance, prévient le CNCT, surtout chez les jeunes qui sont la cible principale du marketing de ce produit. »
Un phénomène qui touche les sportifs
Le comité accuse l'industrie de vouloir s'appuyer sur ces nouveaux modes de consommation de la nicotine pour contrebalancer le déclin de la vente de cigarettes, en profitant du « flou juridique qui entoure encore les produits de nicotine sans fumée dans de nombreux pays dont la France. » Sur les réseaux sociaux, des influenceurs incitent à consommer ces produits. En les présentant comme des « snus » ou des « snus sans tabac ».
Le monde du sport n'est pas épargné : en novembre dernier, les footballeurs Karim Benzema et Marcus Thuram se sont affichés sur Facebook et Instagram, avec une boîte de tabac à sucer. Quelques années auparavant, Zlatan Ibrahimovic et le britannique Jamie Vardy avaient été filmés en train de consommer du snus. Dans le monde du ski et du hockey sur glace, la pratique est déjà ancienne et suffisamment répandue pour les fédérations prennent des mesures : campagnes de communication et mis en place de consultation dédiées.
La stratégie de la confusion
Il y a quelques semaines, le géant Philip Morris a racheté l'entreprise Swedish Match. « Les industriels entretiennent délibérément la confusion avec l’objectif de revenir sur l’interdiction de vente des snus dans les pays de l’Union européenne », alerte le CNCT, qui établit un parallèle avec les stratégies déjà déployées, avec le tabac chauffé présenté comme une « alternative sans combustion ».
Pour le Pr Yves Martinet, président du CNCT, « L’industrie du tabac et de la nicotine développe de nouveaux produits pour multiplier les portes d’entrées dans l’addiction à la nicotine. Cette stratégie lui permet d’attirer de nouveaux consommateurs, notamment parmi les jeunes particulièrement ciblés par les actions marketing ». Il appelle le législateur à clarifier la réglementation autour de ces nouveaux produits du tabac.
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