À l'occasion de la Journée mondiale de lutte contre la drogue et le crime organisé, le collectif « Support, don't punish » lance une nouvelle initiative pour supprimer les sanctions pénales pour la consommation simple de drogue, via une proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale.
Le collectif, qui comprend les associations Aides, l'Asud (Auto-support et réduction des risques parmi les usagers et ex-usagers de drogues), le Syndicat de la magistrature, la Fédération Addiction, l'Association guyanaise de réduction des risques, le Collectif des médecins contre la prohibition, le Collectif d'information et de recherche cannabique (CIRC), Médecins du monde, l'Observatoire international des prisons et l'association Safe, s'est saisi de la disposition qui permet d'ouvrir une pétition sur le site de l'Assemblée nationale.
Si cette dernière obtient 100 000 signatures (authentifiées avec FranceConnect), alors le texte sera mis en ligne sur le site de l'Assemblée. Les députés de la commission désignent alors un député-rapporteur qui propose ensuite soit d'examiner le texte au cours d'un débat faisant l'objet d'un rapport parlementaire, soit de classer la pétition. La Conférence des présidents de l'Assemblée nationale peut également décider d'organiser un débat en séance publique sur une pétition ayant recueilli au moins 500 000 signatures, issues d'au moins 30 départements ou collectivités d'outre-mer.
Un texte « prêt à l'emploi »
« Nous avons voulu porter un texte prêt à l'emploi », explique Samra Lambert, secrétaire permanente du syndicat de la magistrature. Le texte de loi, comporte 14 articles. Il supprime les sanctions pour contraventions simples et prépare des dispositions permettant de punir l'usage dans certaines circonstances comme la conduite automobile. « Nous nous sommes basés sur les travaux du Sénat et du Cese, qui ont conclu la même chose que nous. C'est une question transpartisane », assure Samra Lambert.
Une telle loi mettrait la France en conformité avec les recommandations internationales, et notamment celle de la déclaration de l'ONU de 2018. Actuellement, 66 adjudications dans 38 pays ont déjà retiré la simple consommation de drogues du champ pénal, dont l'Uruguay, l'Allemagne, la Lituanie, l'Australie, la République tchèque ou le Portugal, où depuis la suppression des sanctions en 2001, la consommation n'a pas augmenté. « En revanche, il y a désormais 5 fois moins de décès et le nombre d'infections par le VIH contractées lors d'une injection a été divisé par 18, soutient Marie Drebus, référente réduction des risques liés aux usages de drogues à Médecins du Monde. Le niveau de consommation n'est pas lié au cadre légal. »
« Les sanctions sont une entrave à l'accès aux soins, affirme Marie Drebus. Lors d'une overdose, on a moins le réflexe d'appeler les secours, si on a une consommation que l'on ne souhaite pas réduire pour le moment. La réalité, c'est que l'on a des établissements festifs qui déposent les usagers en train de faire une overdose sur le trottoir avant d'appeler les secours, pour ne pas risquer des sanctions. »
La France, championne de la répression
C'est en France que la consommation simple de drogue est le plus durement réprimée dans l'Union européenne, avec une peine allant jusqu'à un an de prison et 3 750 euros d’amende. Depuis 2020 et la mise en place d'une contravention pour usage simple, les usagers de cannabis de sont en plus passibles d'une amende forfaitaire délictuelle de 200 euros.
Cette amende a de plus « un niveau de recouvrement extrêmement faible, explique Samra Lambert. Ce sont avant tout des personnes en grande précarité, gagnant moins de 300 euros, qui sont interpellés ». Ces derniers ont 3,3 fois plus de risque que la moyenne de faire de la prison ferme pour infractions à la législation sur les stupéfiants.
Désengorger la police et la justice
Depuis les années 90 le nombre d'interpellations par les forces de l'ordre pour infraction à la législation sur les stupéfiants a été multiplié par trois. Une réponse pénale qui n'a pas coïncidé avec une baisse conséquente de la consommation en France, où 21,8 % des 15 à 64 ans ont consommé du cannabis au cours des 12 derniers mois, selon les chiffres de l'OFDT de 2022.
En outre, les signataires du texte estiment qu'une levée des sanctions pour usage simple permettrait de désengorger les services de police et de justice : en moyenne, entre 2016 et 2020, près d'une personne sur cinq mises en cause par la police l'est pour infraction à la législation sur les stupéfiants, dans 80 % des cas pour usage simple, selon les données des services statistiques ministérielles de la sécurité intérieure.
Le coût d'une telle réponse pénale : 1,72 milliard d'euros prévu en 2023, alors que seulement 330 millions sont prévus pour financer les programmes liés à la prévention. Et ce, alors que les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) ne bénéficient toujours pas d'un financement pérenne pour cette mission.
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