L’objectif de cette étude pharmaco-épidémiologique était d’estimer l’usage et le mésusage des triptans, en utilisant la base de remboursement de la Caisse primaire centrale d’assurance-maladie (CPCAM) de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur et Corse (soit 4 millions d’habitants), dans la période de mai 2010 à décembre 2011.
Sur les 95 540 sujets inclus et ayant eu au moins une prescription de triptan durant les 20 mois de l’étude, 2 243 (2,3 %) sont en abus en triptans. L’abus en triptans est défini, d’après la classification de l’International Headache Society (IHS) (1), par la prise d’un triptan au moins 10 jours par mois depuis plus de 3 mois consécutifs Ces patients « surconsommateurs » ont un profil plus sévère, un taux d’hospitalisation plus élevé, et un niveau socio-économique plus faible ; ils consomment plus de traitements de fond (56.8 % vs 35.9 %), et plus de psychotropes [benzodiazépines (69.9 % vs 54.7 %) et antidépresseurs (49.4 % vs 30.2 %)], sans que l’on puisse savoir si la consommation de psychotropes est liée à une comorbidité anxiodépressive ou à un comportement global de consommation plus important. Tous les triptans étaient prescrits dans une proportion équivalente que ce soit dans le groupe des consommateurs occasionnels ou réguliers, sans préférence pour une molécule particulière.
Ce travail confirme l’importance des informations qui peuvent être obtenues à partir des bases de données de la CPCAM. Ainsi, 2.3 % des surconsommateurs de triptans utilisent 20 % de la quantité totale de triptans dispensée. Plusieurs conclusions peuvent être tirées : la première est la nécessité de sensibiliser les acteurs de santé (médecins et pharmaciens) et de diffuser les recommandations de bonne pratique (2) ; la seconde est la sensibilisation des patients à travers des programmes d’éducation thérapeutique ; enfin il sera important de vérifier la tolérance vasculaire des triptans dans la population âgée de plus de 65 ans ; en effet, les études cliniques qui ont conduit à l’obtention de l’AMM, ont inclus des patients entre 18 et 65 ans ; cependant, malgré une amélioration fréquente de la migraine avec les décennies, un certain pourcentage de migraineux reste handicapé par leur migraine au-delà de 65 ans. La prescription d’un triptan peut être parfois nécessaire, les AINS étant souvent contre-indiqués ou mal tolérés. Cette évaluation de la tolérance vasculaire au-delà de 65 ans est d’autant plus nécessaire que les nouvelles classes de traitements de crise de la migraine, à savoir, la classe des gépants qui se caractérisait par son action non vasoconstrictrice, n’est pas disponible.
(1) The International Classification of Headache Disorders, 3rd edition (beta version). Cephalalgia. 2013;33(9):629-808
(2)Lanteri-Minet M et al. Rev Neurol (Paris) 2013; 69(1):14-29
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