L’actualité est anxiogène, comme le montrait un des ouvrages* du Pr Lejoyeux. « Comme ils ont l’habitude d’intégrer dans leur névrose les événements largement médiatisés, les anxieux ont focalisé au XIX e siècle sur la syphilis, il y a vingt ans sur le VIH/sida et, depuis quelques mois, ils ont attrapé au vol la thématique de la crise. Pour ces patients, le praticien doit vérifier s’ils avaient précédemment exprimé des phénomènes d’anxiété et il doit leur accorder la plus grande attention. Il faut se méfier d’un discours général sur le thème "Aujourd’hui, rien ne va plus", qui récupère le pessimisme collectif pour éviter la personnalisation d’un problème. »
Ces personnes doivent être distinguées d’une deuxième catégorie, quant à elle objectivement touchée par la crise : celle des chômeurs et des personnes dont l’emploi est menacé. « Ces dernières années, on nous a beaucoup parlé du stress au travail, mais il est indéniable que la perte d’emploi, par la perte d’image sociale qu’elle entraîne, met à mal l’estime de soi. Des troubles psychologiques peuvent alors apparaître, autrement sérieux que ceux qui sont liés au stress professionnel. »
Quant à la troisième catégorie, elle est susceptible d’être la plus large : « En régime de crise économique générale, explique le Pr Lejoyeux, l’ambiance professionnelle a tendance à se durcir un peu partout. Les salariés doivent atteindre une productivité maximale. Et malheur à ceux qui ne sont pas en mesure de se battre ! »
Dans tous les cas, la vigilance du médecin est d’autant plus impérative que deux phénomènes peuvent cumuler leurs effets masquants : « D’une part, nous connaissons en France une tendance connue au sous-dépistage des troubles anxieux et de la dépression. D’autre part, ces troubles exposent les patients à des autotraitements sauvages, avec le recours à des produits comme l’alcool, ces faux amis dont le potentiel addictogène risque de les piéger. »
À lire : Abrégé d’addictologie (Masson) et Du plaisir à la dépendance, Éditions de La Martinière et Points Seuil.
* Overdose d’info, guérir des névroses médiatiques, Seuil.
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