Aux États-Unis, 250 personnes meurent chaque année d'une allergie aux cacahuètes. D'où l'intérêt de trouver des traitements capables de créer une tolérance chez les allergiques. Une immunothérapie orale par AR101, consistant à ingérer chaque jour une mini-dose de protéines d’arachide, a justement permis d'augmenter la tolérance chez deux tiers des enfants allergiques aux cacahuètes, selon une étude de phase 3 publiée dans le New England Journal of Medicine. Si la FDA l’approuve, cette thérapie pourrait atténuer la réaction allergique en cas d’exposition accidentelle.
« Ce traitement pourrait aider les enfants et les adolescents allergiques aux arachides à se protéger contre l’ingestion accidentelle d’un aliment en contenant », explique le Dr Stephen Tilles, coauteur de l’étude et ex-président de l'American College of Allergy, Asthma & Immunology (ACAAI).
Jusqu'à 4 cacahuètes tolérées par jour
« Lorsque nous avons démarré cette étude, nous espérions qu’en traitant des patients avec l'équivalent d'une cacahuète par jour, beaucoup en viendraient à tolérer jusqu'à deux cacahuètes. Nous avons constaté avec satisfaction que deux tiers des enfants de l'étude sont capables de tolérer l’équivalent de deux cacahuètes par jour après 9 à 12 mois de traitement et la moitié des patients tolèrent l'équivalent de quatre cacahuètes ». Le Dr Tilles est conseiller de la compagnie californienne Aimmune Thérapeutics qui a conçu et financé l’étude publiée dans la revue du New England Journal of Medicine.
« Ce n'est pas une solution rapide, et cela ne veut pas dire que les enfants allergiques aux arachides pourront en manger à leur gré. Mais c'est certainement une avancée, souligne le Dr Jay Lieberman, coauteur de l’étude et vice-président du comité sur les allergies alimentaires de l'ACAAI. L'espoir serait de pouvoir disposer d'un traitement dans la seconde moitié de 2019. Si c’est le cas, les patients qui recevront et pourront tolérer ce traitement pourraient être protégés lors des expositions accidentelles ».
L’étude de phase 3, menée aux États-Unis et en Europe, porte sur près de 500 enfants (4 à 17 ans) allergiques aux arachides et réagissant à 100 mg de protéine d’arachide (1/3 d’une cacahuète) lors d’un test de provocation oral initial. Ils ont été randomisés en double aveugle, dans un rapport de 1 pour 3, à un groupe placebo et à un groupe traité par une mini-dose de protéines d'arachide (AR101). Ce groupe débutait à 0,5 mg de protéines d'arachide et atteignait progressivement, en 6 mois, une dose d'entretien de 300 mg par jour (équivalant à une cacahuète) maintenue jusqu’à la fin de l’étude. Au terme de l’étude (12 mois), les patients ont été soumis à un test de provocation oral, contrôlé par placebo en double aveugle.
Symptômes moins sévères
Globalement, 80 % des patients traités ont réussi à atteindre la dose de maintien (équivalant à une cacahuète), et 67 % des patients traités ont pu tolérer l’équivalent de 2 cacahuètes (600 mg) lors du test de provocation final. « Les réactions aux tests de provocation orale étaient beaucoup plus légères à la fin de l'étude qu'avant le traitement. En moyenne, les participants étaient capables de tolérer une dose d'arachide 100 fois plus élevée à la fin de l'étude comparé au début ; et les symptômes engendrés par cette dose plus élevée étaient moins sévères que ceux engendrés par la faible dose au début de l’étude », souligne le Dr Tilles.
La désensibilisation était commencée sous surveillance. Des effets secondaires ont amené 12 % des patients traités à sortir de l’étude (contre 3 % du groupe placebo). 14 % des patients ont dû recourir à une injection IM d’adrénaline pour gérer une réaction anaphylactique au traitement, de gravité minime toutefois. Les effets secondaires sont restés légers chez 35 % des patients et modérés chez 60 % des patients.
Les allergies alimentaires représentent actuellement la première cause d’anaphylaxie en Europe. Il n’existe actuellement aucune option thérapeutique approuvée pour l’allergie à l’arachide. Si ce traitement est approuvé par les autorités, il sera disponible sur ordonnance et les enfants allergiques aux arachides devront le prendre en continu s’ils veulent conserver l’effet protecteur.
Vickery et al., New England Journal of Medicine, DOI: 10.1056/NEJMoa1812856, 2018
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