PRÉSENTÉES TOUT dernièrement lors du congrès de l’EAU (European Association of urology) par F. H. Schröder (Rotterdam, Pays-Bas), les données récentes issues de l’étude ERSPC (European Randomized Study of Screening for Prostate Cancer) étaient particulièrement attendues. Comme le souligne le Pr Arnauld Villers du CHRU de Lille, coordinateur du bras français de l’essai avec le Dr Xavier Rébillard (Montpellier), « il s’agit en effet du plus vaste essai randomisé jamais mené sur le dépistage du cancer de la prostate ». De fait, l’étude ERSPC, initiée au début des années 1990, concerne plus de 160 000 hommes, âgés de 55 à 69 ans qui ont été tirés au sort pour bénéficier ou non d’un dosage de PSA effectué tous les quatre ans.
Après un suivi médian de 9 ans, une diminution de 20 % du risque de décéder d’un cancer de la prostate a été constatée dans le bras ayant bénéficié d’un dépistage régulier, par comparaison avec les sujets témoins non soumis à un dosage systématique du PSA. Pour un décès évité, le nombre d’hommes nécessitant d’être dépistés est de 1068, et celui nécessitant d’être traités, de 48. Un ajustement pour corriger la non participation dans le groupe invité montre une diminution atteignant 27 % du risque de décéder d’un cancer de la prostate. La tendance observée sur les courbes de mortalité fait prévoir un effet en encore plus important avec un suivi plus long.
Ces résultats qui sont publiés dans le New England Journal of Medicine (1), ont été accueillis « avec satisfaction » par l’Institut National du Cancer (INCa), la Haute Autorité de santé (HAS) et l’Association française d’urologie pour lesquels il s’agit là de « nouveaux éclairages [qui] vont contribuer à la définition de la politique publique à mettre en place », et « qui doivent être analysés en détail et mis en regard des résultats d’autres études actuelles et à venir, concordants ou non ». À cet égard, il est difficile de ne pas citer la publication, dans la même édition du New England Journal of Medicine, des résultats contraires de l’étude américaine PLCO (Prostate, Lung, Colorectal and Ovarian) (2), menée chez « seulement » 70 000 sujets. Pour le Pr A. Villers, « globalement, la méthodologie de l’essai américain ne permet cependant pas de conclure sur l’intérêt du dépistage du cancer de la prostate. En effet, 85 % et 52 % des hommes ont été dépistés dans chaque bras. Cette différence de 33 % explique probablement pourquoi il n’a pas été possible de montrer une différence ».
Des actions programmées.
D’ores et déjà plusieurs actions sont programmées en France. Ainsi le rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé (OPEPS) devrait être prochainement publié. Ce travail va permettre de « mieux connaître les pratiques de dépistage individuel et d’en appréhender les implications pour les patients et la collectivité. Il apportera des éléments d’analyse concernant l’état des lieux des pratiques en vigueur en matière dépistage individuel ». Ce rapport « livrera aussi des éclairages essentiels sur le parcours de soins faisant suite à un diagnostic positif ainsi qu’une évaluation des coûts du dépistage et du traitement ». Enfin, « il fournira des propositions d’améliorations du dispositif actuel de dépistage et de traitement ».
Un autre rapport, établi par un groupe de travail, sur les enjeux majeurs de la prise en charge du cancer de la prostate dans le cadre du programme d’action intégrée de recherche (PAIR) de l’INCa, devrait être remis en juin 2009 et déboucher sur un appel à projets en septembre prochain. Il s’agit en effet « de faire évoluer les techniques et stratégies de diagnostic précoce ainsi que les options thérapeutiques ».
Toutes ces nouvelles données devraient conduire la HAS et l’INCa, avec l’appui de l’AFU, à réétudier les recommandations existantes sur le diagnostic et la prise en charge du cancer de la prostate. À cet égard, un programme pilote est déjà en cours, mené par l’unité programme pilote de la HAS et l’AFU.
D’après un entretien avec le Pr Arnauld Villers, CHRU, Lille, et un communiqué de presse de l’Institut national du cancer et la Haute Autorité de santé et sde l’Association française d’urologie.
(1) Schröder F.H. et coll. N. Engl J. Med 2009 ;360 :1320-8
(2) Andriole G.L. et coll. N. Engl J. Med 360 :1310-9.
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