Les cancers de la vessie localisés mais envahissant le muscle (TVIM) sont grevés d’un pronostic médiocre, avec une survie autour de 50 % à 5 ans. Aujourd’hui, leur traitement repose sur une chimiothérapie néoadjuvante à base de platine par GC (gemcitabine/cisplatine) ou — depuis l’étude française Vesper ayant montré en 2023 sa supériorité — par dose dense MVAC (méthrotrexate/vinblastine/adriamycine/cisplatine) suivie d’une cystectomie radicale. Mais, jusqu’à présent, aucune immunothérapie n’était envisagée.
Un essai présenté à l’Esmo (1) et publié simultanément dans le NEJM (2) pourrait changer la donne. Cet essai de phase 3 montre en effet une amélioration de la survie globale des patients ayant reçu, en plus de la chimiothérapie adjuvante par GC, une immunothérapie anti PDL1 par durvalumab, administrée en situation néoadjuvante et poursuivie ensuite en situation adjuvante (8 cycles). Reste peut-être à vérifier que le bénéfice persiste chez les patients traités par chimiothérapie néoadjuvante utilisant une chimiothérapie dose dense MVAC.
Une étude internationale sur plus de 1 000 patients
L’étude Niagara est une étude de phase 3 randomisée ouverte, menée sur des patients ayant un cancer de la vessie localisé envahissant le muscle, éligible au platine et à une cystectomie radicale. Au total, 1 063 patients ont été randomisés en deux groupes : traitement standard par chimiothérapie néoadjuvante (cisplatine/gemcitabine IV toutes les trois semaines, quatre cycles), suivie de la cystectomie radicale ou traitement standard plus durvalumab en néoadjuvant (cisplatine/gemcitabine/durvalumab IV toutes les trois semaines quatre cycles), suivis de la cystectomie radicale puis du durvalumab en adjuvant (1 500 mg IV toutes les 4 semaines 8 cycles).
La randomisation a été effectuée avec une stratification sur le stade tumoral (cT2N0 vs plus avancé), la fonction rénale (CL supérieure à 60 ml/min versus entre 40 et 60 ml/min) et statut PDL1 (élevé/bas/négatif).
Le critère primaire est la survie sans récidive et les réponses complètes, la survie totale intervenant en critère secondaire.
Un bénéfice significatif à deux ans
L’analyse présentée à l’Esmo 2024 est une analyse intermédiaire préplanifiée réalisée en avril 2024, à 24 mois de survie médiane.
Elle met en évidence une amélioration significative, de près de 40 %, de la survie sans récidive. Soit une survie de 59,8 % dans le bras standard versus 67,8 % dans le bras immunothérapie (RR=0,68 [0,56-0,82] ; p < 0,0001). Ce bénéfice s’accompagne d’une augmentation de 25 %, elle aussi significative, de la survie globale. Soit à 24 mois à 67,8 % dans le bras standard versus 82,2 % dans le bras immunothérapie (RR=0,75 [0,59-0,93]).
Le taux de réponses complètes est comparable (88 % sous durvalumab vs 83 %).
À noter, l’immunothérapie n’a pas compromis la cystectomie complète. Elle a été pratiquée respectivement chez 88 % des patients du bras durvalumab et 83 % du bras standard. D’ailleurs les seules raisons de ne pas la pratiquer ont été les refus des patients.
Enfin, les taux de toxicités majeures sont globalement comparables, avec 41 % de toxicités de grade 3/4 dans chaque bras. On a eu d’ailleurs le même taux d’interruptions, liées aux effets secondaires dans chaque bras au cours du traitement néoadjuvant, il s’élève à 15 %. S’y ajoutent ensuite 8 % d’interruptions sous durvalumab au cours du traitement adjuvant.
Pour les auteurs, ce résultat suggère de modifier les standards à l’avenir. Ce nouveau traitement pourrait donc s’imposer, même si d’aucuns regrettent que l’étude n’ait pas permis de faire la part entre le bénéfice lié à l’ajout de l’immunothérapie, d’une part en situation néoadjuvante, et d’autre part en adjuvant.
(1) Thomas Powles. A randomized phase II trial of neoadjuvant durvalumab plus chemotherapy followed by radical custectomy and adjuvant durvalumab in muscle invasive bladder cancer. Esmo 2024, LBA 5
(2) Thomas Powles et al. Perioperative durvalumab with neoadjuvant chemotherapy in operable bladder cancer. NEJM 2024 Sep 15
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?