Après trente ans de forte augmentation, l’incidence globale du cancer du sein tend à diminuer en France, depuis 2005. Mais, révélation inattendue dévoilée récemment par « le Monde », cette diminution serait principalement due à la chute de l'incidence chez les femmes au-delà de 50 ans car, chez les plus jeunes, elle continuerait de gripper.
Le quotidien s'est attelé à une analyse des données épidémiologiques concernant 35 cancers – données issues des registres disponibles sur le site des agences sanitaires publiques (notamment Santé publique France -SpF). Le journal a aussi mis en ligne un outil interactif permettant de visualiser l'incidence de ces cancers entre 1980 et 2012, par tranche d'âge et par sexe.
« Aucune agence publique n’a, jusqu’à présent, publié sous cette forme les données officielles d’incidence du cancer », affirme « le Monde ».
Santé publique France salue ce travail. Contactée par « le Quotidien », Florence de Maria, épidémiologiste et coordinatrice du programme de surveillance des cancers en population générale à Santé publique France salue cette percée de l'open data : « Je me réjouis de cette mise en avant des données de santé publique France, d’une part cela prouve que l’open data ça fonctionne, d’autre part, ça permet de relayer nos messages. »
Une analyse par tranche d'âge peu prudente
« Le Monde » aurait-il mis en lumière une tendance que les épidémiologistes des agences publiques auraient laissée passer ? À l’Institut national du cancer (INCa), Norbert Ifrah, président de son conseil d'administration, estime que « ce n’est pas un travail d’épidémiologiste, ce n’est pas un travail de statisticien. C’est un travail de graphiste ou de journaliste ».
L'hématologue précise pourquoi des épidémiologistes auraient « hésité » à exploiter les données des registres publiques de cette manière : « La fiabilité des registres au début des années 1980 n’était pas la même que celle des registres réalisés ces 15 dernières années » – information d'ailleurs soulignée par les journalistes du « Monde », dans le chapitre « les limites des chiffres officiels ».
Autre réserve exprimée par le président de l'INCa : « Lorsque les tranches d'âge sont trop découpées, on fait apparaître des intervalles de confiance sur chaque chiffre, qui deviennent problématiques, et qui nous obligent à être très nuancés dans ce que nous affirmons. »
Un appel du Réseau environnement santé
Le chercheur André Cicolella via le Réseau environnement santé, à l'occasion de ces chiffres, interpelle directement l'INCa : « Il est temps que l’Institut national du cancer se préoccupe sérieusement des causes environnementales du cancer. » Et d'expliquer : « Le développement du cancer chez les jeunes adultes correspond à des générations exposées in utero aux substances chimiques du type perturbateurs endocriniens (…) Plus que jamais, il est nécessaire d’éliminer de notre environnement les perturbateurs endocriniens. »
Le président de l'INCa se défend. « Devant un cancer du sein ou devant un cancer de la thyroïde, personne ne peut dire : voilà la cause. Ce serait s’affranchir de la vérité. L’incantation n’est pas une solution », lance-t-il évoquant le sérieux de ses équipes. « L’augmentation du risque de cancer aujourd’hui, est liée pour un tiers au moins lié au vieillissement, pour 1/3 à l'amélioration du diagnostic et pour 1/3 à l’accroissement intrinsèque des maladies – c’est quelque chose de multifactoriel. Nous nous préoccupons de toutes les causes », conclut-il.
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