LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN - Quelles sont vos attentes par rapport aux Thermalies, salon qui accueille chaque année environs 30 000 visiteurs ?
Pr CHRISTIAN-FRANÇOIS ROQUES - Nous espérons continuer à faire connaître le thermalisme, en particulier dans sa dimension médicale et sanitaire. Et faire part des progrès et travaux de recherche réalisés pour démontrer aussi bien le bénéfice médical que la sécurité, les modes d’action, etc. Il y a ce qui se fait en France, en particulier dans le domaine médical, et ce qui se fait dans les autres pays. Les Thermalies nous offrent l’occasion de communiquer sur ces thématiques. Car le thermalisme, ce n’est pas seulement le bien-être, les loisirs et la remise en forme, qui représente en France une part très modeste. Il faut le voir aussi sous l’aspect sanitaire, celui d’une médecine complémentaire qui ne prétend pas avoir de vertu vraiment curative mais qui va contribuer à stabiliser des affections chroniques incapacitantes et permettre aux patients d’avoir une fonction conservée le mieux possible ainsi qu’une qualité de vie aussi bonne que possible, en particulier en souffrant moins, en prenant moins de médicaments pour calmer la douleur.
Êtes-vous satisfait du retrait, en octobre dernier, de l’amendement Bur (qui prévoyait de réduire le taux de remboursement des soins thermaux de 65 à 35 %), ou attendez-vous encore d’autres actions de la part des pouvoirs publics ?
Les pouvoirs publics, en particulier la caisse d’assurance-maladie, mais également le ministère de la Santé, ont validé la convention qui lie l’assurance-maladie avec la profession thermale, et dans cette convention il était précisé que les partis devaient rédiger une approche scientifique du service médical. La convention a été signée en 2002. En 2004, on a mis en place l’AFRETH, qui, elle-même, a organisé des appels à projet qui ont permis de financer des études sur le SMR (service médical rendu). Une convention a été signée à nouveau, publiée au « Journal officiel », quelques jours avant que M. Bur ne dépose son amendement auprès de la commission des Affaires sociales. L’Assurance-maladie connaît les efforts de recherche qu’on effectue, aussi bien sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif. Cet amendement, dans le fond, n’était pas très logique.
Le thermalisme est-il pour autant tiré d’affaire ?
Toute thérapeutique doit prouver son efficacité. Pour le thermalisme, ça a commencé un peu plus tard, pour des raisons qui se comprennent, en particulier parce que sur le plan méthodologique, c’est plus complexe que l’évaluation d’un médicament. Ces problèmes ne sont pas réglés depuis très longtemps. De plus, les essais cliniques sont coûteux. Et le public, en particulier les grands organismes de recherche comme l’INSERM ou les programmes hospitaliers de recherche clinique du ministère de la Santé, n’avait jamais retenu les projets thermaux qui lui avait été proposés. Il a donc fallu trouver un mode de financement tout à fait spécifique et original, qui permet aujourd’hui de réaliser des essais.
Qui sont les personnes qui se rendent en cure thermale ?
Des patients qui ont des affections pour lesquelles les autres thérapeutiques traditionnelles sont soit en échec, soit en impasse. Les traitements ne sont pas toujours efficaces et la chirurgie n’est pas toujours indiquée et pas toujours possible. Ces personnes ont du mérite parce que ça leur coûte cher ! C’est, à l’heure actuelle, la thérapeutique médicale qui coûte le plus cher au patient.
Quel est le prix total d’une cure thermale ?
Toutes dépenses confondues, le prix d’une cure s’élève en général à 1 500 euros. L’Assurance-maladie ne prend que 500 euros en charge. Je ne m’expliquerai pas que des gens continuent à se rendre en station thermale, étant donné le coût d’une cure, si elle ne devait pas être efficace ! D’autant plus que, pour la plupart, ce sont des endroits qui ne sont pas très « joyeux ».
L’étude Stop TAG, destinée à évaluer l’efficacité de la crénothérapie dans les troubles anxieux généralisés, a rencontré un certain succès. Quelles en sont les suites ?
Les effets notés durant la cure et après sont durables, pour les troubles anxieux généralisés, pendant près de six mois. Il y a eu une très forte augmentation de demandes de cures dans les stations à orientation psychosomatique depuis la publication de cette étude.
Quelles sont les autres études en cours ?
L’étude Thermarthrose, sur l’arthrose du genou, a enrôlé 462 patients. Ces chiffres ne sont pas neutres, car c’est la première fois qu’une étude thermale aura une population suffisante pour pouvoir vérifier de façon statistique, l’hypothèse qu’elle teste. Les résultats ne pourront donc pas être contestés. Ils seront révélés après sa publication dans une grande revue médicale courant 2009. Une autre étude pilote médico-économique sur les rhumatismes, qui comprend 700 patients, est également en cours. D’autres études concernent l’obésité, l’insuffisance veineuse, le sevrage de psychotropes ou encore les suites des cancers du sein.
A-t-on déjà des résultats concernant cette étude chez les femmes en cure thermale post-cancer du sein ?
Nous pouvons déjà noter une qualité de vie nettement améliorée, un niveau d’anxiété abaissé, une estime de soi accrue et un niveau d’activité physique meilleur chez les femmes qui ont suivi le programme. Il y a une perte de poids significative. C’est important, car on sait que le surpoids auquel se laissent aller certaines femmes à cause de leur maladie, n’est pas favorable pour l’évolution de leur état de santé. Il faut donc compenser ce surpoids par l’activité physique et la diététique. C’est une bonne manière pour lutter contre la récidive. Cette étude est donc très encourageante. D’autres résultats positifs seront révélés certainement par la suite. Mais il est vrai que le processus est long. Il faut donc être patient.
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