LE QUOTIDIEN : Il y a un an, vous aviez l'ambition d'analyser les données de 500 000 patients à travers les États-Unis. Combien ont aujourd'hui intégré le programme CancerLinQ ?
KEVIN FITZPATRICK : Nous analysons aujourd'hui les données de plus d'un million de patients ! Environ 70 hôpitaux contribuent à nourrir cette base de données. Le programme a beaucoup de succès et nous y intégrons chaque semaine un nouvel établissement. Nous prêtons attention à ce que les cliniques soient représentées dans leur diversité : privées, publiques ou à caractère social. Il s'agit de développer la plus grande base de données au monde sur l'oncologie et d'en partager le fruit avec nos partenaires, les autorités de santé, les entreprises pharmaceutiques ou encore les assureurs car nous pensons qu'il est d'intérêt public de partager ce savoir.
Avez-vous déjà publié les résultats positifs que CancerLinQ a pu permettre ?
Tous les chercheurs me posent cette question ! Nous menons actuellement un gros travail qualitatif sur ces données et sur leur fiabilité. On ne se pressera pas pour publier quoi que ce soit mais nous jugeons raisonnable de pouvoir révéler les premiers résultats en juin 2017 pour le prochain congrès annuel de l'ASCO à Chicago. À ce jour, nous avons publié six articles sur les protocoles et le processus d'anonymisation des données. Il me semble utile de préciser que l'importance de la cohorte change aussi la manière d'analyser les données.
De quel point de vue ?
Dans une étude clinique classique, vous recrutez des patients et vous espérez pouvoir rassembler une population qui entre dans vos critères de recherches. C'est une étape qui prend énormément de temps et d'argent. Ici, la donnée est déjà collectée. On peut donc adopter une attitude beaucoup plus pragmatique vis-à-vis de son étude.
Pensez-vous que l'utilisation de cette plateforme numérique permet aux praticiens de mieux soigner ?
La plateforme permet au praticien d'acquérir de meilleures connaissances sur son patient et de prendre des décisions plus rapides quant à son traitement. On a déjà pu identifier de nouveaux biomarqueurs et de nouvelles mutations dans le génome de la tumeur. Ce sont également ces données et pas seulement celles du patient que nous devons mettre en perspective.
Quel est votre credo pour soutenir l'innovation en santé ?
Il faut unir nos forces au-delà des barrières géographiques afin de pouvoir comparer les dépenses, les économies et les parcours de soins au travers des différents systèmes de santé. C'est à mon sens la meilleure solution pour tirer profit du big data dans la perspective de délivrer le meilleur soin à chacun.
Pour autant, je ne pense pas qu'il faille créer une base de données mondiale. La barrière n'est pas technologique mais législative, au regard des lois sur les données de santé propres à chaque nation. En revanche, nous pouvons fédérer les chercheurs de chaque pays travaillant sur ce type de base de données. L'essentiel est de pouvoir effectuer nos recherches selon des critères harmonisés pour conduire l'analyse la plus fiable qui soit.
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