Peintures, caoutchoucs, bétons, verrerie, fonderie, chimie… Près de 365 000 travailleurs seraient exposés par inhalation à la silice cristalline. Ce minéral présent dans l'ensemble de la croûte terrestre, rencontré le plus souvent sous forme de quartz,a été classé cancérogène avéré pour l'homme (groupe 1) par le CIRC en 1997.
Parmi ces 365 000 travailleurs, entre 23 000 et 30 000 seraient exposés à des niveaux excédant la valeur limite d'exposition professionnelle (VLEP) de 0,1 mg/m3 en vigueur en France, et plus de 60 000 à des niveaux excédant la VLEP la plus basse proposée au niveau international établie à 0,025 mg/m3, estime l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), dans un rapport publié ce 22 mai.
Risques avérés de cancers
L'ANSES fait état d'un risque sanitaire particulièrement élevé pour la population professionnelle exposée à des niveaux équivalents ou supérieurs à la VLEP actuelle. Sont particulièrement concernés le secteur de la construction, de la fabrication des produits minéraux, de la métallurgie et les industries extractives. À risque aussi, « les bricoleurs en contact avec des matériaux spécifiques qu'ils poncent ou qui percent du béton », précise Guillaume Boulanger de l'unité d'évolution des risques liés à l'air à l'ANSES. Et de noter au passage que les niveaux très faibles de silice que l'on peut retrouver aussi dans les granulés de litière pour chat sont sans conséquence sur la santé humaine.
Toutes les études publiées depuis 1997 confirment le lien entre silice cristalline et développement du cancer broncho-pulmonaire. Un lien majoré par la présence d'une silicose pulmonaire (mais qui existe bien indépendamment de la silicose, contrairement à ce que l'on pensait auparavant).
En outre, l'expertise de l'ANSES confirme une association significative avec le risque de développer une maladie auto-immune comme la sclérodermie systémique, le lupus érythémateux systémique et la polyarthrite rhumatoïde. Et avec le risque de déclarer des pathologies respiratoires non malignes telles que la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), l’emphysème, la tuberculose (surtout en cas de co-infection avec le VIH et en cas de tabagisme).
Les experts font également état d'une association entre l'exposition à la silice cristalline et le risque de pathologie rénale ou de pneumopathie infiltrante diffuse de type fibrose pulmonaire idiopathique, mais sans que les données actuelles ne puissent précisément l'expliquer.
Réviser diagnostic, dépistage et tableau des maladies professionnelles
L'ANSES rappelle l'importance de la prévention pour les travailleurs exposés à la silice cristalline, et recommande de réviser les VLEP, jugées insuffisamment protectrices, sans faire de distinction entre ses différentes formes.
En termes de surveillance médicale, l’Agence propose de redéfinir les critères diagnostiques des diverses formes anatomo-cliniques de la silicose en intégrant les formes ganglionnaires isolées (formes précoces). Elle suggère plusieurs pistes à évaluer : la place de la tomodensitométrie thoracique dans le dépistage de la silicose et des pathologies associées chez des sujets exposés professionnellement, la pertinence de la recherche systématique de formes précoces de silicose dans la prise en charge de cancer broncho-pulmonaire, la recherche d'expositions professionnelles à la silice chez des patients souffrant de pathologie auto-immune, de tuberculose par test IGRA chez les travailleurs concernés, ou encore l'intérêt d'une surveillance de la fonction rénale chez ces derniers.
Enfin, l'ANSES prône une révision des tableaux de maladies professionnelles en lien avec la silice cristalline, compte tenu de la mise en évidence d’un risque de cancer broncho-pulmonaire indépendamment de la silicose et de l’extension de la définition de la silicose aux formes ganglionnaires isolées.
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