Option voire référence
La chirurgie par voie endoscopique des cancers du pharynx et du larynx est récemment devenue une option thérapeutique et même un traitement de référence pour certaines tumeurs. Il s’agit d’une chirurgie minirâlement invasive qui emploie des technologies nouvelles pour éviter une voie d’abord transcutanée et simplifier les suites opératoires en évitant dans la majorité des cas une trachéotomie et une alimentation par sonde. Le contrôle carcinologique est comparable à la chirurgie par voie externe pour des tumeurs sélectionnées et ces techniques n’induisent aucune perte de chance pour les patients. Les deux techniques actuellement employées sont : la chirurgie par voie endoscopique au laser et, plus récemment, la chirurgie par voie transorale assistée par robot. Ces approches nécessitent un matériel spécifique et une formation adaptée du chirurgien, des médecins anesthésistes, des infirmiers du bloc opératoire et des médecins anatomopathologistes, et impliquent, comme pour tout cancer, une discussion au préalable en réunion de concertation pluridisciplinaire.
Principes
Ces techniques s’inscrivent dans le cadre de la chirurgie de préservation d’organe (laryngectomie ou pharyngectomie partielles). Elles préservent les fonctions physiologiques que sont la voix, la parole et la déglutition, contrairement aux techniques dites mutilantes (laryngectomie totale par exemple). La voie d’accès transorale permet de limiter la résection aux structures anatomiques nécessaires, préservant la muqueuse et les muscles sains dont la mobilité et la sensibilité interviennent lors de la phonation et la déglutition, contrairement à certaines techniques chirurgicales de préservation d’organe à ciel ouvert. L’exérèse intéresse les structures atteintes par la tumeur, parfaitement visualisées sous microscope ou à l’aide d’optiques rigides, et emporte toujours une zone de tissu sain, principe majeur de la chirurgie oncologique. Les limites d’exérèse peuvent également être contrôlées pendant l’intervention par un examen histopathologique extemporané. Le traitement des aires ganglionnaires (par chirurgie ou radiothérapie) y est associé selon le siège et le stade de la tumeur.
La chirurgie endoscopique au laser
Le terme « laser » est un acronyme de l’anglais « Light Amplification by Stimulated Emission of Radiation ». Il s’agit d’un faisceau lumineux d’une longueur d’onde spécifique généré par la stimulation lumineuse d’un cristal ou d’un autre dispositif dans une chambre comportant des miroirs permettant de constituer une onde. Un faisceau focalisé est employé pour la section des tissus, comme un bistouri à distance. La voie d’abord endoscopique transorale par laryngoscopie ou pharyngoscopie en suspension est combinée avec un microscope opératoire laryngé à distance focale de 40 cm connecté au laser CO2. Le laser en mode focalisé permet d’effectuer l’exérèse tumorale avec une hémostase simultanée des vaisseaux de moins de 0,5 mm. L’hémostase par électrocoagulation ou clips est nécessaire pour les vaisseaux d’un diamètre supérieur.
La chirurgie transorale assistée par robot
Le robot chirurgical est un outil de chirurgie vidéo assistée par ordinateur où l’opérateur est situé à distance du patient, aux commandes d’une console localisée dans la salle d’opération ou à distance. Les optiques rigides et les instruments (pinces, bistouri électrique) tenus par les bras du robot sont mis en place par voie transorale à l’aide d’un rouvre bouche. Les instruments sont ensuite commandés par le chirurgien assis à la console. L’interface du robot entre le chirurgien et le patient permet une meilleure visualisation endoscopique en 3 dimensions et un meilleur contrôle du geste — l’ordinateur du robot élimine le tremblement physiologique et permet une pronosupination de 360°. Cette technique permet d’aborder par les voies naturelles des régions anatomiques inaccessibles par les techniques de chirurgie transorale classiques, car l’optique et les instruments peuvent être orientés dans les trois plans de l’espace permettant « d’opérer dans les coins ».
Suites opératoires
La chirurgie mini-invasive endoscopique n’apporte souvent pas de réduction du temps opératoire par rapport aux techniques par voie externe, mais plutôt une réduction de la durée d’hospitalisation et une simplification des suites opératoires. Les suites et la durée d’hospitalisation dépendent de l’étendue et du siège de la résection, de l’âge du patient et d’un éventuel antécédent de radiothérapie. La durée d’hospitalisation moyenne est de 1 à 7 jours. Même si une sonde d’alimentation est nécessaire de manière transitoire, il a été démontré que la durée de l’alimentation entérale est plus courte qu’après la chirurgie par voie externe. La trachéotomie est également plus rarement nécessaire avec les techniques mini-invasives. Les risques d’infection locale, de fistule pharyngée et d’hémorragie sont moins importants avec ces techniques par rapport aux techniques à ciel ouvert.
Avantages
Cette chirurgie minimale invasive a pour avantages l’absence de trachéotomie et une réhabilitation de la déglutition et de la voix plus rapide et plus facile qu’après une chirurgie par voie externe. L’exérèse peut être répétée en cas de récidive ou de cancer métachrone. Tous les traitements restent possibles en cas d’échec local ou de localisation métachrone : nouvelle exérèse mini-invasive, exérèse à ciel ouvert, radiothérapie ou radiochimiothérapie. La chirurgie a également l’avantage d’éviter les séquelles tardives de la radiothérapie et de préserver la radiothérapie pour un éventuel cancer métachrone cervicofacial (« deuxième cancer »).
Désavantages
La réalisation de cette chirurgie dépend avant tout du plateau technique (l’investissement dans le matériel et l’entretien) et de la formation et de l’expérience de l’équipe chirurgicale. Elle implique une formation et une expérience spécifiques notamment en ce qui concerne l’anatomie et la gestuelle chirurgicale et une connaissance du matériel de vidéochirurgie. À l’heure actuelle, les indications restent limitées à des tumeurs de stade précoce. La visualisation parfaite de la tumeur est impérative, et une mauvaise exposition du fait de la morphologie du patient ou des caractéristiques de la tumeur peut également contre-indiquer la technique.
Conclusion
Les techniques mini-invasives, réservées à des tumeurs sélectionnées, après discussion en réunion de concertation pluridisciplinaire oncologique, permettent d’éviter une voie d’accès à ciel ouvert, limitant ainsi les séquelles de la chirurgie et améliorant les suites opératoires.
Références
Hartl DM. La chirurgie par voie endoscopique au laser en cancérologie cervico-faciale. Bull Cancer 2 007;94:1 081-6.
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