Les sujets anxieux ou dépressifs ont un risque plus élevé de mourir de certains cancers, révèle une étude britannique publiée dans le « British Medical Journal ».
Les épidémiologistes sous la coordination de G. David Batty (université d'Edimbourgh) montrent, d'après les données non publiées de 16 études britanniques chez plus de 160 000 adultes suivis plus de 9 ans en moyenne (4 350 décès par cancer, > 16 types de cancer), que la mortalité par cancers est augmentée de 30 % chez les sujets ayant les scores plus élevés d'anxiété et de dépression.
Pour les cancers non liés au tabac, le risque est augmenté de 45 %, de 85 % pour les cancers colorectaux voire plus que doublé pour le pancréas et l'œsophage et multiplié par 4 pour les leucémies. Pour deux cancers, colorectal et du pancréas, il est apparu que le risque augmentait avec le niveau de troubles psychologiques.
Mécanismes pro-inflammatoire et dysimmunitaire
C'est la première fois que l'association entre syndrome anxio-dépressif et mortalité par types de cancer est étudiée. L'influence de la dépression avait été analysée jusque-là dans la mortalité globale, les causes externes de décès, la mortalité totale par cancer et les maladies cardio-vasculaires. Ces nouveaux résultats dans les cancers confortent le rôle de la dépression dans les maladies somatiques.
Ces résultats sont néanmoins à confirmer, soulignent les auteurs, compte tenu du caractère observationnel de l'étude. De plus, un lien de causalité inverse, - le cancer ne serait pas la conséquence mais la cause des troubles de l'humeur (effet direct, annonce du diagnostic, progression tumorale) - est tout aussi plausible, en dépit de certaines précautions de l'analyse.
Malgré tout, les auteurs proposent plusieurs mécanismes possibles, biologiques ou comportementaux. Outre les facteurs contrôlés dans l'étude (tabac, alcool, activité physique), d'autres facteurs comportementaux associés à la dépression peuvent entrer en jeu, comme le fait de moins se faire dépister. Sur le plan biologique, la dépression et l'anxiété sont connues pour augmenter les marqueurs de l'inflammation (IL6, CRP, TNF) et pour perturber le système immunitaire.
Vers des algorithmes multifactoriels
Plusieurs autres facteurs de risque, possiblement confondants, ont été pris en compte, comme l'âge, le sexe, le niveau d'éducation, le statut socio-économique, l'indice de masse corporelle (IMC), l'activité physique, le tabagisme et la consommation d'alcool.
Les chercheurs ont d'ailleurs constaté que, hormis pour les cancers du poumon fortement liés au tabac, le risque lié à un syndrome anxio-dépressif était du même ordre de grandeur qu'un tabagisme actif ou une obésité.
« Individuellement, cependant, aucun de ces facteurs de risque n'était assez puissant pour déterminer le risque personnalisé d'un sujet », précisent les auteurs. Pour le cancer colorectal par exemple, la sensibilité était seulement de 8 % pour le syndrome anxio-dépressif, de 17 % pour un tabagisme actif et de 27 % pour l'obésité.
D'où l'idée proposée par les chercheurs de se diriger vers le développement d’algorithmes multifactoriels, - comme en cardio-vasculaire - incluant l'anxiété et la dépression, « ce qui n'est pas le cas aujourd'hui », notent-ils.
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