LE QUOTIDIEN - Les patients semblent enthousiastes au sujet de l’émergence des nouvelles technologies en cancérologie; n’y a-t-il pas aussi des motifs de préoccupation au sujet de cette “révolution copernicienne” et de ses phases de transition ?
Pr Patrice VIENS - Plus que de l’enthousiasme, les patients ont surtout des attentes auxquels il nous faut répondre ! A l’ère des nouvelles technologies, ils veulent être soignés « hors les murs », tout en restant « connectés » et acteur de leur prise en charge. Le patient a changé et nous devons penser l’hôpital autrement. UNICANCER, qui réunit les 20 Centres de lutte contre le cancer (CLCC), anticipe les évolutions de la cancérologie en réalisant des études prospectives, pour répondre aux attentes des patients. Cette nouvelle enquête* vient conforter cette « révolution » dont vous parlez. Les CLCC sont en train d’expérimenter des solutions « connectées ». Les retours sur leur utilisation semblent plutôt favorables : fiabilité des solutions, compréhension par des publics même âgés. En tout cas, ces solutions connectées répondent en partie aux nouveaux enjeux de coordination des soins et de suivi hors les murs des patients. Il reste cependant des difficultés juridiques telles que les autorisations CNIL, l’évaluation des dispositifs. Les financements actuels ne sont pas pérennes car dépendants d’appels à projets publics, de fonds propres, de conseils régionaux, départementaux, dons et legs etc…. et cela est un réel problème.
Tous les acteurs de la cancérologie française sont-ils en phase ? Qu’Est-ce qui fait parmi eux la spécificité du modèle UNICANCER ?
Les CLCC investissent dans des équipements de pointe, lancent des essais cliniques innovants, développent de nouveaux modèles organisationnels dans tous les domaines et continuent de compléter leur offre de service, en particulier avec des programmes de suivi à distance. Je pourrai vous citer beaucoup d’exemples, comme les projets présentés par les lauréats au Prix UNICANCER de l’INNOVATION de cette année. L’innovation et la quête de l’excellence, l’humanisme, la multidisciplinarité et l’égal accès de tous à des soins de qualité constituent le « modèle » UNICANCER incarné par les CLCC.
L’INCa a pointé dans son dernier rapport les inégalités territoriales, avec des taux départementaux de mortalité très disparates (de 1 à 2); au sein des CLCC, confirmez-vous cette problématique et comment la traitez-vous ?
Les CLCC nouent de nombreux partenariats avec les hôpitaux périphériques, ce qui nous permet de couvrir largement le territoire. Le dispositif des autorisations en cancérologie doit revoir à la hausse les seuils d’activité et mieux cibler certaines pathologies rares nécessitant une prise en charge dans des centres de références. La gestion des dépenses de transport doit prendre en compte ce dernier point.
Confirmez-vous qu’il existe un blocage réglementaire en France concernant l’accès aux nouveaux traitements ?
Les réactions des associations de patients et des professionnels de la cancérologie ont été vives ces derniers jours sur ce sujet : il faut trouver un équilibre entre le juste prix de l'innovation lorsqu'elle est réelle et la capacité de la rendre accessible à tous et ainsi donner la possibilité à tous nos patients d’avoir une chance supplémentaire de guérir d’un cancer. Dans le cadre de la préparation de la stratégie nationale de santé, nous avons répondu présent à la large concertation lancée par la ministre Agnès Buzyn. La cancérologie a prouvé qu’elle est un formidable terrain d’innovations thérapeutiques et technologiques. Il nous paraît donc essentiel qu’en déclinaison de la Stratégie nationale de santé, un nouveau plan cancer, prenant le relais du Plan cancer 3 en cours, soit élaboré par l’Etat en 2018.
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