« On avait cliniquement observé qu'une rémission complète avant greffe, bien que ce soit un critère favorable, n'était pas toujours nécessaire à un bon pronostic post-greffe chez des patients souffrant de LAM en rechute ou réfractaire. Nous avons voulu en savoir plus et tester l'hypothèse dans un essai randomisé de phase III », expliquent les auteurs de l’essai.
Évaluer l’effet de la chimiothérapie intensive prégreffe
L'étude ASAP porte sur 272 patients adultes d'âge médian 61 ans (52-66 ans), présentant une LAM en rechute (35 %) ou réfractaire après une première cure d'induction (65 %). Ils devaient être éligibles à une chimiothérapie intensive et une allogreffe, c’est-à-dire disposer d'un donneur apparenté à HLA-compatibilité supérieure à 9/10 ou de deux donneurs potentiels en cours d'identification. Ils ont été randomisés en deux bras. Avant la greffe, 134 patients ont été traités par une chimiothérapie intensive visant la rémission (RIST), associant cytarabine (3 g/m² deux fois par jour pour les plus de 60 ans à J1-J3) et mitoxanthrone (10 mg/m² à J3-J5), et 138 mis sous simple surveillance avec si besoin une chimiothérapie de contrôle (DISC : cytarabine/mitoxanthrone à basses doses). Dans ce groupe DISC, les trois quarts des sujets ont été uniquement suivis, et un quart a eu besoin d'une chimiothérapie basse dose de contrôle de la maladie.
Dans le bras RIST, presque la moitié des patients (46 %) ont atteint une réponse complète, cinq patients ont reçu une seconde cure de chimiothérapie, et les autres ont été greffés sans plus attendre de rémission.
Le critère primaire est la réponse complète à J56 post-greffe testé en non-infériorité. Les principaux critères secondaires sont la survie globale (SG) et la survie sans rechute (SSR).
Pas d’amélioration de la survie après trois ans de suivi
La réponse complète à J56 post-greffe est a minima non inférieure dans le bras DISC, puisqu'elle est de 84 %, versus 81 % dans RIST. Les SSR à un an, après réponse complète à J56, sont elles aussi comparables (71 % bras DISC versus 70 % groupe RIST), au terme d'un suivi médian de 37 mois après randomisation. Enfin, les SG à un an et trois ans ne différent pas. La SG à un an après randomisation est de 69 % (61-76 %) dans le groupe DISC versus 72 % (63-79 %) dans le bras RIST. Quant à la SG à trois ans, elle atteint respectivement 51 % (42-60 %) versus 54 % (44-63 %) [p = 0,47, NS].
« Les résultats sont sans appel. Ils montrent pour la première fois que viser une rémission complète prégreffe n'améliore pas significativement le pronostic chez ces patients, résument les auteurs. Ces données prêchent pour un conditionnement séquentiel suivi d'allogreffe sans chimiothérapie de rémission préalable, dès qu'un donneur de cellules souches est effectivement prêt. Elles soulignent au passage que l'allogreffe est le traitement le plus efficace et qu'il faut rechercher un donneur au plus tôt après le diagnostic », commentent les auteurs.
« Cet essai ouvre des perspectives en clinique. Il pourrait en particulier permettre à plus de patients, souvent écartés de la greffe lors d'échec de la chimiothérapie prégreffe dans les systèmes de santé aux ressources limitées, d'accéder aux allogreffes. Plus globalement, il suggère d'accélérer la transplantation dès qu'un donneur compatible est disponible, sans attendre l'indétectabilité de cellules malignes. Ce qui revient à greffer directement dans la foulée du conditionnement séquentiel, sans passer par la case chimiothérapie de rémission », commente également le Pr Matthias Stelljes, coordinateur de l'essai.
(1) Stelljes M et al. In Patients with Relapsed/Refractory AML Sequential Conditioning and Immediate Allogeneic Stem Cell Transplantation (allo-HCT) Results in Similar Overall and Leukemia-Free Survival Compared to Intensive Remission Induction Chemotherapy Followed By Allo-HCT: Results from the Randomized Phase III ASAP Trial . Late Breaking Abstract 4. ASH, La Nouvelle Orléans, décembre 2022
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