Aujourd'hui, en France, la leucémie myéloïde associée à une exposition au formaldéhyde ne figure dans aucun tableau de maladie professionnelle. Ce 14 novembre, l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a publié un rapport où elle conclut à un lien de causalité « avéré » entre l'exposition professionnelle au formaldéhyde et les leucémies myéloïdes (dont leucémies myéloïdes chroniques et leucémies aiguës myéloïdes). Depuis 2014, le formaldéhyde, appelé plus couramment « formol » lorsqu’il est sous forme liquide, est une substance classée cancérogène de catégorie 1B et mutagène de catégorie 2 au niveau européen.
Le formaldéhyde est déjà inclus dans plusieurs tableaux de maladies professionnelles dans les régimes de sécurité sociale (général et agricole), concernant les affections telles que dermites, eczéma, rhinite et asthme, depuis plus de cinquante ans, ou encore le cancer du nasopharynx depuis 2012. En revanche, à cette époque, le niveau de preuves avait été jugé insuffisant pour montrer un lien de causalité avec la leucémie myéloïde.
Ces dernières années, les connaissances relatives aux pathologies liées aux expositions au formaldéhyde se sont étayées. La Direction générale du travail, la Direction de la sécurité sociale et la Direction des affaires financières, sociales et logistiques ont alors saisi l’Anses début 2021 pour réaliser ce travail d’expertise en vue de la création d’un tableau de maladie professionnelle.
Améliorer la reconnaissance des victimes
« [Sa création] faciliterait la reconnaissance des cas de cancers associés à une exposition professionnelle », note l'Anses. Le rapport indique en effet que peu de demandes de reconnaissance de maladie professionnelle ont été formulées concernant les leucémies myéloïdes : entre 2011 et 2021, huit ont été répertoriées, dont seulement trois ont obtenu un avis favorable.
L'Agence justifie dans son rapport : « Des études montrent que les hématologues ont des connaissances très inégales des facteurs de risque professionnels et du fonctionnement du dispositif de reconnaissance ». Il est également difficile de tracer les expositions professionnelles au formaldéhyde, notamment pour les travailleurs du nettoyage. « Leurs trajectoires professionnelles, souvent fragmentées, rendent en effet difficile le repérage et la traçabilité des expositions à des substances dangereuses », est-il précisé.
À la recherche d'alternatives
D'autre part, courant 2021, l’Anses a identifié de potentielles alternatives au formaldéhyde dans cinq secteurs d’activité (l’alimentation humaine, l’alimentation animale, la pisciculture, le diagnostic médical et la thanatopraxie). En complément, une méthode générale pour comparer des alternatives à une substance chimique avait également été publiée à cette époque. L’Agence insiste : « la substitution doit rester la démarche prioritaire ».
De nombreux secteurs professionnels concernés
Selon une enquête de 2017, 185 900 salariés sont exposés à cette substance et 34 500 sont exposés à des résines à base de formaldéhyde susceptibles d’en libérer, soit 0,7 % et 0,1 % respectivement de la population salariée couverte par l’enquête. Sont concernés 86 sur 88 secteurs de la nomenclature des activités françaises.
Le formaldéhyde est utilisé notamment en tant que conservateur en thanatopraxie, désinfectant en milieu hospitalier et en agriculture ou fixateur dans les laboratoires d’anatomocytopathologie. Il est également libéré sous forme de gaz par certains produits ou résines utilisés dans l’industrie du bois, du textile ou du caoutchouc.
Depuis environ 20 ans, la proportion de travailleurs exposés semble cependant diminuer avec l’inscription de règles particulières de prévention des risques cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction dans le Code du travail. Les travailleurs des services funéraires, du secteur des soins de santé, des travaux de charpente et de la fabrication de placage et de panneaux en bois demeurent toutefois « soumis à des niveaux d’exposition élevés », alerte l’Anses.
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