Présenté récemment à l’Asco-GU, l’essai Getug-AFU 18 est un essai ouvert de phase 3 multicentrique randomisé en deux bras, comparant une radiothérapie 80 Gy à une radiothérapie 70 Gy, associées à une hormonothérapie prolongée trois ans (agonistes de la LH-RH) dans les cancers de la prostate à haut risque. Soit des adénocarcinomes prostatiques de stade T3-T4 et/ou un score de Gleason ≥ 8, sans atteinte ganglionnair (N0) au scanner à l’IRM ou au curage. Les patients étaient tous en bon état général (Ecog ≤1), ils ont été randomisés avec une stratification sur la réalisation, ou non, d’un curage ganglionnaire pelvien et sur le centre.
70 vs 80 Gy associés à 3 ans d’hormonothérapie
Le critère primaire retenu est l’absence de progression biochimique ou clinique à cinq ans. La survie totale et les toxicités aiguës et à long terme et la qualité de vie constituent les critères secondaires.
Au total, 500 patients ont été recrutés entre 2009 et 2013 dans 25 centres français. D’âge médian 71 [52-80] ans, plus de la moitié avaient un score de Gleason ≥ 8 et près de deux tiers présentaient une tumeur de stade T3 (62 %). Leur taux de PSA médian initial était autour de 14 ng/ml. Parmi eux, 16 % ont subi un curage ganglionnaire. En absence de curage, tous les patients ont été soumis à une irradiation pelvienne des ganglions (46 Gy).
La survie sans progression clinicobiologique à cinq ans s’est montrée statistiquement améliorée dans le bras 80 Gy : 91,4 vs 88,1 %. Et ce bénéfice est pérenne.
À sept ans, la survie sans progression est de 88,1 vs 79,2 %, quand, à dix ans, elle est améliorée en relatif encore de plus de 40 % : 83,6 % vs 72,2 % (RR = 0,56 [0,40-0,76] ; p = 0,0005).
Cette avancée se traduit en outre par des bénéfices significatifs en termes de survie spécifique et survie globale. À dix ans toujours, la survie globale est améliorée de 40 %, avec 77 versus 66 % (RR = 0,61 ; p = 0,0039) de survivants. La survie spécifique a quant à elle progressé de plus de moitié puisque l’on est à 95,6 vs 90 % (RR = 0,48 ; p = 0,009). Soit une réelle avancée chez ces patients déjà sous hormonothérapie optimale.
« Et ce, sans impact sur les toxicités à long terme, d’autant que la radiothérapie est désormais délivrée systématiquement de façon ciblée, par radiothérapie avec modulation d’intensité (IRMT) », souligne le Pr Christophe Hennequin (CHU Saint Louis, Paris), qui présentait l’étude Getug-AFU-18 fin janvier à l’Asco-GU (1).
Vers un nouveau standard de radiothérapie dans les formes à haut risque ?
« En 2009, quand l’essai Getug-AFU 18 a été initié, nous avions choisi de viser les trois ans d’hormonothérapie, bien que cette durée ne deviendra la norme qu’un peu plus tard : l’hormonothérapie prolongée (au moins 18 mois et jusqu’à trois ans) n’est passée dans les standards qu’en 2010. On est donc sur une durée optimale en termes de déprivation androgénique : les patients ont eu en moyenne 33 mois d’hormonothérapie dans cette étude », explique le Pr Hennequin.
« En revanche on est sur une radiothérapie fractionnée, délivrée sur 40 séances pour le bras haute dose (40 x 2 Gy) et 35 pour l’autre bras (35 x 2 Gy). Alors, qu’entre 2010 et 2020, on a montré qu’on pouvait réduire le nombre de séances, en utilisant 3 Gy par séance. Aujourd’hui, le standard n’est donc plus une radiothérapie fractionnée conventionnelle mais une radiothérapie hypofractionnée, à raison de 60 Gy délivrés en 20 séances quotidiennes à la dose de 3 Gy/séance, prévient le Pr Hennequin. Il faudrait donc maintenant évaluer, au moyen de modèles radio-biologiques, quelle serait la dose X en hypofractionné équivalente à 80 Gy en fractionnement conventionnel. Sachant que les 60 Gy par fractions de 3 Gy utilisés aujourd’hui équivalent à environ à 72-76 par fractions de 2 Gy. Nous allons en discuter très prochainement au sein du Getug et préciser le nouveau standard de radiothérapie à retenir », indique le Pr Hennequin.
Cette étude a en effet clairement démontré que, même lors d’hormonothérapie prolongée, intensifier la radiothérapie améliore largement le pronostic, avec un bénéfice important en survie spécifique et globale. Et ce, sans majorer les toxicités, d’autant qu’aujourd’hui l’IRMT s’est généralisée. « Il faut donc au plus vite en faire profiter nos patients », conclut le Pr Hennequin
Entretien avec le Pr Christophe Hennequin (CHU Saint Louis, Paris)
(1) Hennequin C et al. Long-term results of dose escalation (80 vs 70 Gy) combined with long-term androgen deprivation in high-risk prostate cancers: GETUG-AFU 18 randomized trial. LBA 259, Asco GU 2024
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