L’INSTITUT de veille sanitaire (InVS), le réseau français des registres de cancer (FRANCIM), le service de biostatistique des Hospices civils de Lyon (HCL) et l’Institut national du cancer (INCa) ont présenté hier, à l’occasion d’un colloque sur les enjeux et les perspectives de la surveillance épidémiologique des cancers en France, les résultats de projections de l’incidence et de la mortalité par cancer en 2009. C’est la première fois que de telles projections sont réalisées à partir d’analyses statistiques des données d’incidence recueillies par FRANCIM et des données de mortalité fournies par le Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc) de l’INSERM. Afin d’en assurer la qualité et l’exhaustivité, les données après recueil, validation et consolidation ne sont disponibles qu’avec un certain délai, actuellement de quatre ans pour les données d’incidence et de deux ans pour la mortalité. « Si l’observation de l’évolution passée est intéressante en termes d’interprétation épidémiologique, en regard de l’évolution de facteurs de risque ou des pratiques diagnostiques, disposer d’estimations les plus récentes possibles est également un enjeu », notent, dans le « Bulletin épidémiologique » de cette semaine (n°38), Laurent Remontet, Aurélien Belot et Nadine Bossard, pour le comité de pilotage de la base commune des registres des cancers. L’enjeu est surtout crucial pour l’INCa, qui a rejoint en avril 2008 l’InVS, FRANCIM et les HCL dans un « programme de partenariat scientifique 2008-2010 » et qui, pour mieux assurer sa mission de mettre en uvre le Plan cancer, souhaitait disposer de telles estimations afin d’évaluer les besoins de la population en matière de prise en charge des cancers.
Trois scénarii.
« Réaliser des projections à N+5, comme cela est actuellement nécessaire pour fournir des taux d’incidence pour l’année en cours, doit d’accompagner d’une certaine prudence, ces projections étant par nature incertaines », souligne le comité. Afin de rendre compte de cette incertitude, trois scenarii différents ont été envisagés. Dans le premier (scénario A), les analystes ont considéré que la tendance récente (celle observée au cours des cinq dernières années) se prolonge ; dans le deuxième (B), le risque de cancer pour les années postérieures à 2005 est supposé constant et égal à celui de 2005 (seuls les changements démographiques expliquent l’évolution du nombre de cas) ; dans le troisième scénario (C), c’est la tendance moyenne du risque, observée entre 1980 et 2004, que l’on suppose se poursuivre. Les 3 scenarii ont été soumis à un groupe d’épidémiologistes du réseau FRANCIM qui ont systématiquement envisagé lequel devait être retenu en fonction de la localisation du cancer et des connaissances épidémiologiques disponibles. Pour certaines localisations, ils ont aussi tenu compte des tendances récentes observées à travers les données des caisses d’assurance-maladie sur les ALD30 (Affection longue durée). « Le choix du scénario est ainsi un travail d’interprétation et d’anticipation, qui repose sur la synthèse de tous les éléments disponibles. Pour certaines localisations, ce choix peut rester difficile et pourra être remis en cause au fur et à mesure que d’autres données seront disponibles », prévient le comité.
À la baisse ou à la hausse.
Pour le cancer du sein, l’un des deux cancers les plus fréquents en France avec celui de la prostate, d’après les données ALD30, « une chute brutale de l’incidence du cancer du sein s’est produite dans certaines classes d’âge à partir de l’année 2005 », signalent les auteurs. Cette baisse est potentiellement en relation avec « la forte diminution de la prescription des traitements hormonaux substitutifs de la ménopause », expliquent-ils, la concomitance de ces deux phénomènes ayant également été observée dans d’autres pays. Les données 2004 des registres ne restituant pas cette baisse, le scénario B a été choisi plutôt que le scénario A, qui a généralement été considéré a priori comme le plus plausible pour l’incidence et la mortalité. L’incidence des cas serait en 2009 en légère augmentation, avec 51 759 (contre 49 814), une estimation qui surestime sans doute l’incidence réelle ; la mortalité serait, elle, stable à 11 924 décès (contre 11 201).
Pour le cancer de la prostate, « la tendance récente et la tendance moyenne correspondent toutes deux à des augmentations vertigineuses, conduisant à des projections de près de 100 000 nouveaux cas par an », indiquent les auteurs. Selon eux, il serait « peu prudent » de faire une prédiction à partir de ces données tant l’impact du dépistage par dosage du PSA peut être important. Aux États-Unis, l’utilisation intensive du PSA avait par exemple provoqué un doublement du taux d’incidence en cinq ans avant qu’une baisse brutale ne survienne, d’abord chez les plus de 65 ans puis chez les plus jeunes. En France, les taux voisins de 130/100 000 en 2004, attendraient 195/100 000 ou 219/100 000, selon le scénario A ou C. Pour ces raisons, le scénario B, jugé plus minimaliste, a là aussi été retenu.
Le poids très important de ces deux localisations fait peser également une incertitude sur la projection tous cancers : 197 711 nouveaux cas chez l’homme, 149 215 chez la femme pour un nombre de décès respectivement de 85 311 et 61 628.
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