L’insuffisance cardiaque pourrait-elle être prévenue par une immunothérapie ? C’est le pari que fait une équipe américaine en montrant dans Nature le potentiel à bloquer une voie de signalisation impliquée dans la fibrose pathologique. Ces résultats obtenus chez la souris ouvrent la voie à des essais cliniques de cardio-immunothérapie.
Dans ce travail, l’équipe dirigée par le Dr Kory Lavine, cardiologue à l’université de Washington, a d’abord étudié l’expression génique multi-omique en cellule unique à partir des prélèvements cardiaques de 45 patients insuffisants cardiaques après infarctus. À partir de là, l’équipe a pu identifier une lignée de fibroblastes dont la trajectoire est associée à l’évolution de la maladie, ce qui leur a permis de déterminer les modèles animaux au phénotype le plus proche de l’humain pour poursuivre les expérimentations. Cette étape était cruciale car certains fibroblastes participent à l’intégrité structurelle cardiaque, quand d’autres sont impliqués dans l’inflammation et le développement d’une fibrose cicatricielle.
« Notre recherche suggère que les fibroblastes impliqués dans la cicatrisation post-infarctus sont très semblables à ceux associés au cancer et à d’autres processus inflammatoires, explique le Dr Kory Lavine, dans un communiqué. Cela ouvre la porte à des immunothérapies qui pourraient contrôler l’inflammation et la formation de tissu cicatriciel. »
Un rationnel à tester dans des essais cliniques
Les scientifiques ont ensuite identifié la signalisation de l’IL-1 bêta comme un maillon clé dans le processus menant les fibroblastes à créer du tissu cicatriciel. En testant un inhibiteur de l’IL-1 dans un modèle murin, l’équipe a observé une diminution de la formation fibreuse et une amélioration de la fonction cardiaque à l’échographie.
Alors qu’il existe déjà deux anticorps monoclonaux anti-IL-1 autorisés dans des pathologies inflammatoires rhumatismales (canakinumab, rilonacept), des données pour l’un d’eux suggèrent des bénéfices dans l’insuffisance cardiaque. Il s’agit de l’essai Cantos (pour Canakinumab Anti-inflammatory Thrombosis Outcome Study) qui évaluait le canakinumab dans l’athérosclérose. « Même si l’essai n’était pas conçu pour tester le traitement dans l’insuffisance cardiaque (…), des analyses secondaires montrent que le traitement était associé à une réduction notable des admissions pour ce motif par rapport au traitement standard », rapporte le Dr Lavine. Il reste que le canakinumab n’est sans doute pas le candidat idéal, en raison du risque d’infections observé. Les chercheurs espèrent que l’ensemble de ces preuves se traduise par des essais cliniques avec un anticorps ciblé sur la signalisation impliquée dans l’insuffisance cardiaque.
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