La fibrillation atriale compte parmi les arythmies les plus fréquentes, et reste à l’origine d’une moindre qualité de vie, d’un surrisque d’accident vasculaire cérébral (AVC), d’infarctus, et ainsi de décès. Le traitement repose sur une cardioversion électrique et/ou sur des options pharmacologiques.
Cependant, nombre de patients ne sont pas éligibles aux traitements médicamenteux – en particulier en cas d’hypertrophie ventriculaire, de cardiopathie ischémique, ou d’insuffisance cardiaque. Et pour cause, les molécules disponibles à l’heure actuelle se révèlent non seulement peu efficaces, mais aussi associées à un risque significatif d’effets indésirables graves tels que l’arythmie ventriculaire (proarythmie).
Pour éviter cela, la recherche s’emploie depuis plusieurs années à développer de nouveaux médicaments sans tropisme ventriculaire. Si, jusqu’à présent, les principaux candidats se sont avérés inefficaces, une molécule pour le moment baptisée AP30663, représentante d’une nouvelle classe pharmacologique – les inhibiteurs du canal KCa2 –, a donné des signaux d’activités prometteurs, sans déclencher d’effets ventriculaires chez l’animal.
Une efficacité significative
L’efficacité de ce nouveau candidat médicament a alors été testé en phase 2, chez des patients ayant manifesté un épisode de fibrillation atriale datant de moins de sept jours lors de leur inclusion (1). Il s’agit de la première évaluation chez l’être humain d’un inhibiteur du canal KCa2.
En tout, 59 sujets de 64,3 à 65,5 ans d’âge médian, dont 68 à 80 % d’hommes, ont été randomisés entre septembre 2019 et décembre 2022 et ont reçu une perfusion de 3, ou 5 mg/kg du candidat médicament, ou un placebo. Les participants ont ensuite été suivis pendant 30 jours. Le critère de jugement principal reposait sur une cardioversion dans les 90 minutes suivant l’administration du candidat traitement.
Résultats : une efficacité du candidat médicament se dessine. Une cardioversion à 90 minutes a bel et bien été enregistrée chez plus de 40 % des participants ayant reçu 3 mg/kg du médicament, et chez 55 % de ceux s’étant vu administrer 5 mg/kg – contre 0 % dans le bras placebo. Ainsi, selon les auteurs, « les deux doses ont montré une probabilité de supériorité sur le placebo de plus de 99,99 % ». Les durées moyennes pour atteindre la cardioversion étaient de 47 minutes avec 3 mg/kg, et de 41 minutes avec 5 mg/kg.
S’assurer de la sécurité d’AP30663
Le tout, sans signaux de sécurité singuliers. En particulier, aucun cas d’arythmie ventriculaire n’a été rapporté – sur le faible effectif étudié.
Le travail a été prématurément stoppé du fait de difficultés à recruter des patients pendant la pandémie de Covid-19
Au total, les auteurs concluent que l’AP30663 a montré son efficacité vis-à-vis de la cardioversion de la fibrillation atriale, pour un profil de sécurité qui semble acceptable. Ils jugent plus largement l’inhibition du canal KCa2 prometteuse pour la cardioversion pharmacologique.
Une évaluation en phase 3 reste requise afin de s’assurer de ces résultats. Car le présent travail a été prématurément stoppé du fait de difficultés à recruter des patients pendant la pandémie de Covid-19. Reste en particulier à confirmer la persistance de la cardioversion permise par le traitement, et l’innocuité de la molécule – notamment vis-à-vis de signaux relevés en phase 1 (non retrouvés dans cet essai de phase 2) : réactions au site d’injection, tremblements et ataxie.
(1) Holst, A.G., Tomcsányi, J., Vestbjerg, B. et al., Inhibition of the KCa2 potassium channel in atrial fibrillation: a randomized phase 2 trial, Nat Med (2023)
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