L’ÉTUDE PARITE s’est intéressée aux modalités de prise en charge des hypertendus en fonction du sexe et du niveau de risque cardio-vasculaire (RCV). Pour cela, 654 cardiologues libéraux ont inclus chacun 4 patients hypertendus consécutifs : 2 hommes et 2 femmes, sur une période de 6 mois (de mars à août 2010). Une population de 3 440 patients hypertendus (1 819 hommes et 1 621 femmes) a ainsi été obtenue.
La comparaison des caractéristiques des sujets hypertendus adressés au cardiologue montre que les hommes ont plus de facteurs de risque cardiovasculaire (FDRCV) que les femmes. En effet, si celles-ci sont un peu plus âgées et un peu plus sédentaires, les hommes ont un IMC (indice de masse corporelle) plus élevé, sont plus souvent diabétiques, dyslipidémiques et/ou fumeurs. Ils consomment davantage d’alcool et ont plus fréquemment une hypertrophie ventriculaire gauche (HVG). Les antécédents familiaux cardiovasculaires précoces et l’ancienneté de l’hypertension artérielle (au moins 10 ans), ne diffèrent pas en fonction du sexe. En revanche, en plus de présenter un plus grand nombre de FDRCV, les hommes ont aussi deux fois plus souvent une atteinte d’un organe cible ou une maladie cardiovasculaire ou rénale que les femmes. « Globalement, résume le Dr Maxime Guenoun (Paris), « les hypertendus de cardiologue » constituent une population à risque. »
Répartition du RCV selon le sexe.
En ce qui concerne le niveau tensionnel, aucune différence significative n’est relevée entre hommes et femmes : 30 % des sujets ont une PAS/PAD inférieure à 140/90 mmHg ; 60 % ont entre 140/90 mmHg et 180/110 mmHg et 5 % ont au moins 180/110 mmHg. Quelques différences apparaissent quant à la nature du traitement à l’arrivée à la consultation : les hommes ont plus de composés agissant sur le système rénine-angiotensine et d’inhibiteurs calciques ; les femmes ont plus de diurétiques. En revanche, il n’apparaît pas de différence en fonction du sexe sur la prescription des bêtabloquants, sur le nombre de traitements et sur la fréquence des bithérapies. Peu de patients sont non traités (1 %), 25 % ont une monothérapie et 74 % une bithérapie ou plus. « Ces patients hypertendus, hommes et femmes, sont donc des patients assez sévères comme en témoigne le niveau tensionnel à l’entrée dans l’étude. Or, sur l’ensemble de la population, 1/3 seulement des patients sont contrôlés. Chez les patients diabétiques ou insuffisants rénaux pour qui la cible tensionnelle est plus exigeante (130/85 mmHg), seulement 8 %, hommes et femmes, sont contrôlés. »
Une nette différence en termes de bilans complémentaires.
Le relevé des examens réalisés pendant le semestre précédant l’inclusion dans l’étude montre une différence nette entre hommes et femmes. Dans la population totale, plus d’examens sont effectués chez les hommes que chez les femmes à part l’échocardiographie et la MAPA dont la fréquence est similaire. Ainsi, l’épreuve d’effort est effectuée deux fois plus souvent chez les hommes (41 % contre 19 % chez les femmes). Il en est de même pour l’échodoppler vasculaire, les nouveaux moyens de recherche d’ischémie coronarienne (échographie de stress, scintigraphie, IRM), la recherche d’apnée du sommeil et la coronarographie.
Chez les patients à RCV élevé, un peu moins de différences sont notées selon le sexe, mais l’homme est globalement plus exploré avec, toujours, deux fois plus d’épreuves d’effort, de recherches d’apnée du sommeil et de coronarographies. La recherche d’une ischémie myocardique est aussi deux fois plus souvent effectuée chez les hommes que chez les femmes en particulier en cas de RCVG moyen et élevé. « Il y a donc un déficit de bilan complémentaire chez les femmes surtout pour la recherche de cardiopathie ischémique, note Maxime Guénoun. Bien sûr, les hommes ont plus souvent des antécédents coronariens que les femmes, mais même chez les patients non coronariens, cette différence d’approche est retrouvée : 36 % des hommes ont eu une épreuve d’effort contre 19 % des femmes seulement. Et chez les patients âgés les résultats sont les mêmes. »
Les cardiologues peu interventionnistes.
À la question, « le cardiologue est-il très interventionniste pour modifier le traitement antihypertenseur en fonction du sexe et du RCV ? », l’étude PARITE répond : « Non. Quels que soient le sexe et le niveau de RCV, le cardiologue n’a modifié le traitement que dans 30 à 40 % des cas. » En fait, les cardiologues réagissent en fonction du niveau tensionnel. Le traitement a été modifié chez 60 à 70 % des hommes et des femmes dont l’HTA n’était pas contrôlée et chez 90 à 95 % des hommes et des femmes dont le niveau tensionnel était très élevé (PAS › 160 mmHg et/ou PAD › 100 mmHg).
Les enseignements tirés de l’étude PARITE sont multiples. « Alors que la polythérapie antihypertensive est de mise chez ces patients à RCV élevé, ils n’en sont pas pour autant bien contrôlés. De façon assez surprenante, le réajustement thérapeutique effectué par le cardiologue tient compte des chiffres tensionnels mais peu du niveau de RCV. » Le Dr Guenoun attire l’attention sur la nécessité d’une meilleure prise en charge du RCV chez la femme notamment coronarienne. « Si une information des médecins et du grand public est indispensable, il faut se rappeler que sur 15 millions d’hypertendus en France, 5 millions sont non traités. Le travail d’éducation va donc au-delà de la prise en charge médecin généraliste-cardiologue. »
Session « Homme, femme : une même prise en charge au quotidien en 2010 ? L’étude PARITE ».
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