Alors que ce 17 mai 2023 marque le 10e anniversaire du mariage pour tous, une étude française publiée dans le « Journal of the American Heart Association » révèle que les femmes lesbiennes et bisexuelles ont davantage de facteurs de risque de maladies cardiovasculaires que les hétérosexuelles, tandis que les hommes gays obtiendraient de meilleurs scores en termes de santé cardiovasculaire que les hétéros masculins.
Les chercheurs de l'Université Paris Cité et de l'Inserm se sont penchés sur les données de la cohorte Constances, incluant près de 170 000 adultes sans maladies cardiovasculaires, recrutés entre 2012 et 2020 dans une vingtaine de villes. Plus de 53 % sont des femmes, d'âge moyen 46 ans. Parmi elles, 0,6 % se définissent comme lesbiennes, 3, 5 % comme bisexuelles ; chez les hommes, 3 % et 3,8 % se disent respectivement homos et bisexuels.
La santé cardiovasculaire est mesurée selon deux échelles proposées en 2010 puis 2022 par l'American Heart Association : la Life's Simple 7 (LS7) qui prend en compte l'apport alimentaire, l'activité physique, le statut tabagique, l'indice de masse corporelle (IMC), la glycémie, la tension artérielle et le cholestérol, et la Life's Essential 8 (LE8) qui ajoute la qualité de sommeil.
Après ajustement, les femmes lesbiennes et bisexuelles obtiennent des scores plus faibles à LE8 (respectivement -0,95 et -0,78 point), comparées aux hétérosexuelles. A contrario, les gays (+2,72) et bisexuels (+0,83) avaient des scores au LE8 supérieurs aux hommes hétéros. Dans le détail, les femmes lesbiennes semblaient plus vulnérables en termes de tension artérielle et de nutrition, les bisexuelles, plus enclines à fumer, ce qui se retrouve aussi chez les hommes bisexuels, qui rapportent en outre plus de problèmes de sommeil.
Stress des minorités
Si cette étude est inédite en ce qu'elle examine les scores LS7 et LE8 des minorités sexuelles au sein d'une grande cohorte, ses résultats sont cohérents avec le risque accru de maladies cardiovasculaires retrouvé dans de précédents travaux.
Selon les auteurs, le stress des minorités, modèle qui unit les aspects biologiques et psychosociaux, pourrait expliquer les disparités de santé au sein des minorités sexuelles, dont on sait qu'elles sont plus souvent confrontées à de la discrimination, de la violence, et par conséquent, à des problèmes de santé mentale.
En outre, les différences entre les femmes et hommes homo- ou bisexuel.le.s peuvent découler d'inégalités en termes de ressources et de capacité de résilience pour affronter les difficultés. Les auteurs suggèrent que la protection santé universelle pourrait compenser un statut socioéconomique ou une santé mentale plus dégradée chez les hommes homosexuels - ce qui serait moins vrai en revanche dans les zones rurales où les gays semblent plus sujets à la pression sociale. Les scientifiques notent aussi que les femmes lesbiennes enceintes ont les mêmes scores, voire de meilleurs, que les hétérosexuelles, en raison d'un accès plus régulier au système de santé lors de la grossesse.
Cibler la prévention
En conclusion, l'étude appelle à renforcer la prévention des facteurs cardiovasculaires chez les minorités sexuelles, notamment la promotion du sevrage tabagique, d'une alimentation saine et de l'exercice physique chez les femmes lesbiennes ou bisexuelles.
« L'amélioration des compétences culturelles et de la sensibilisation au risque de maladie cardiovasculaire chez les adultes des minorités sexuelles peut contribuer à améliorer les conversations entre médecins et patients sur la santé cardiovasculaire, y compris la prévention et la prise en charge », commente le premier auteur Omar Deraz.
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