« PRIMA FACIE signifie en latin "premier regard" et en termes juridiques "premier élément de preuves". C’est également l’acronyme de Prévention des risques maternels et ftaux axés sur le conseil et l’information éclairés. L’idée est d’offrir un dépistage des risques obstétricaux au début de la grossesse, au cours du premier trimestre », indique le Pr Yves Ville, chef du service de maternité de l’hôpital Necker (Paris), fondateur de cette structure pilote de soins, de recherche et d’enseignement officiellement inaugurée hier mais qui fonctionne depuis le 1 er septembre dernier.
Ce centre au nom évocateur est situé au 4 e étage de l’Institut de puériculture et de périnatalogie, au sein de l’unité fonctionnelle d’obstétrique et de médecine ftale et propose à toutes les femmes, qui font elles-mêmes la démarche ou qui sont adressées par leur médecin traitant, un bilan global, clinique, biologique et échographique entre la 11 e et la 14 e semaines d’aménorrhée. Le concept est novateur. C’est la première structure de ce genre en France et la deuxième en Europe après celle de Londres. « À Londres, la structure est située à l’endroit où est née la mesure de la clarté nucale mais c’est un centre privé. Prima facie est la première structure publique qui propose un tel dépistage. C’est un service public qui s’inscrit dans la mission de l’Assistance publique de faciliter l’accès aux soins de toutes les femmes et dans les objectifs du prochain plan quadriennal de favoriser la prévention », souligne le praticien.
Six grands risques.
Six grands risques sont aujourd’hui dépistés au cours du premier trimestre : l’hypertension artérielle gravidique, la prééclampsie, le retard de croissance intra-utérin, la grande prématurité, l’hémorragie de la délivrance, le risque de malformation ou d’anomalie chromosomique.
« Depuis dix ans, on discute du dépistage de la trisomie 21 au cours du premier trimestre. L’arrêté devrait être publié au "Journal officiel" dans les jours qui viennent. Réglementairement, on va devoir dépister les aneuploïdies au premier trimestre. Cela concerne 1 femme sur 800. Mais on sait aujourd’hui que les deux marqueurs du premier trimestre (PAPP-A et fraction libre de la ß-hCG) permettent d’obtenir des informations très importantes sur le risque d’éclampsie et le risque de retard de croissance. C’est une avancée médicale. En combinant la clinique (interrogatoire systématique), la prise de la pression artérielle avec un Dynamag, la mesure de la pression artérielle moyenne, l’échographie avec mesure de la nuque associée à une étude morphologique, une mesure de la longueur du col, un Doppler des artères utérines, une prise de sang, il est possible de dépister ces six grands risques qui concernent 15 à 20 % des femmes enceintes », explique le spécialiste. Les résultats sont rendus au bout de deux heures - deux heures et demi.
« La plupart des femmes (90 %) seront estimées à bas risque et pourront être suivies en dehors de l’hôpital par leur généraliste, leur gynécologue ou une sage-femme. À l’inverse, celles qui présentent un risque particulier vont être orientées vers les structures les plus adaptées en fonction du type de risque et de leur lieu de résidence. L’idée est d’établir avec elle un parcours de grossesse », précise-t-il. Seuls les risques ftaux pourront être pris en charge à l’hôpital Necker.
Le centre, qui s’adresse en priorité à la population d’Ile-de-France, peut accueillir 20 000 femmes par an. Depuis septembre, 1 200 ont déjà bénéficié d’un bilan réalisé par le médecin senior, les 3 étudiants hospitaliers et les 4 sages-femmes du centre. Une sage-femme de PMI les rejoindra peut-être afin d’assurer une consultation psychosociale. « J’en ai fait la demande auprès du Conseil général mais je n’ai pas encore de réponse », indique le fondateur du centre.
Tous ces examens (à part la recherche de marqueurs pour la trisomie 21, dont le remboursement est suspendu à la publication de l’arrêté au JO) et consultations sont gratuits et inscrits dans la nomenclature du suivi de grossesse.
Issues de grossesse.
La recherche est l’autre point fort du centre. Les femmes remplissent à leur arrivée un dossier médical, dont les données seront conservées, et il leur est demandé de documenter les issues de grossesse. « Notre objectif est de mettre au point des tests pour les différents dépistages sur lesquels nous travaillons, qui génèrent le moins d’anxiété et le moins de gestes invasifs avec le meilleur compromis possible entre sensibilité et spécificité », conclut le praticien.
D’autres centres pourraient bientôt voir le jour à Clermont-Ferrand, Nantes, Rouen et Marseille, qui, ont déjà fait part de leur intérêt.
Pour l’heure, les fondateurs veulent sensibiliser et informer les médecins, les gynécologues, les sages-femmes... et bien sûr les femmes, à cette nouvelle démarche et offre de prévention.
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?