L’essai TRIUMPH, soutenu par les autorités de santé australienne, a fait le buzz à Orlando (USA). "Ses résultats posent en effet question en pratique clinique" commente le Pr Jacques Blacher (CHU Hôtel-Dieu, Paris).
Plus de patients aux objectifs tensionnels avec la trithérapie
L'étude TRIUMPH conduite au Sri Lanka porte sur 700 patients hypertendus dont quasi deux tiers (60 %) naïfs de tout traitement antihypertenseur et un tiers diabétiques ou insuffisants rénaux. Ces sujets (58 ans d’âge moyen, 60 % de femmes) présentaient à l'inclusion une PA moyenne de 154/90 mm Hg. Ils ont été randomisés en deux bras :
- Traitement direct par trithérapie fixe à faibles doses (Telmisartan 20 mg/Amlodipine 2,5 mg/Chlorthalidone 12,5 mg),
- Traitement standard (initiation par une monothérapie, adaptation à la discrétion du médecin en fonction de la réponse tensionnelle).
Au terme des 6 mois d’étude, la proportion de patients aux objectifs tensionnels < 140/90 mm Hg, ou < 130/80 mm Hg pour les diabétiques ou insuffisants rénaux, est significativement supérieure sous trithérapie d'emblée. On atteint les 70 % versus 55 % (RR = 1,23 ; 1,09-1,39). Ce différentiel tensionnel (-9/8 mm Hg en PAS ; - 5 mm Hg en PAD) a été atteint dès la 6e semaine et s'est maintenu jusqu'à la fin de l'étude (6 mois).
Quelles leçons en pratique clinique aujourd'hui ?
« Cette nouvelle approche d’instaurer directement une trithérapie à faibles doses va droit au but. Bien sûr, certains patients n'avaient probablement pas besoin d'autant. Mais il n'y a manifestement pas plus d'effets secondaires, du moins à 6 mois. C'est ma principale réserve à cette étude. Certains effets secondaires sont en effet plus tardifs et il s'agit d'un traitement à vie. Mais à cette seule réserve cette stratégie est sans conteste gagnante. Et bien qu'elle ait été réalisée au Sri Lanka, il y a fort à parier que le bénéfice soit retrouvé de la même manière en France », précise le Pr Blacher.
Les enquêtes comme FLASH montrent chaque année que de nombreux hypertendus ne sont toujours pas contrôlés. Et que les recommandations HAS, préconisant de passer en seconde intention assez rapidement à une bithérapie puis à une trithérapie au besoin, sont insuffisamment suivies.
Or pour mémoire, 80% de l'efficacité d'un antihypertenseur est atteint à demi-dose. Et nous ne disposons de quasiment aucun facteur pronostic - hormis l'âge et la peau noire, eux-mêmes de peu de poids - de réponse à tel ou tel type d'antihypertenseur. Alors que plusieurs mécanismes participent à l'HTA. Dans ce contexte, associer directement un antagoniste calcique, un inhibiteur du système rénine angiotensine plus un diurétique, à faibles doses est une bonne idée. C'est en tout cas une stratégie gagnante dans cet essai même si ce succès reste à confirmer dans un pays comme la France. Mais il y a fort à parier que ce soit le cas. Quand aujourd'hui aucune bithérapie n'est agréée en France pour l'initiation du traitement, à la différence d'autres pays (USA, Canada…) et ceci même pour une PAS initiale franchement élevée. Il reste donc du chemin à faire.
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