LA PRÉVENTION des complications thromboemboliques de la chirurgie digestive est aujourd’hui bien codifiée par les recommandations de la Société française d’anesthésie -réanimation. Le premier point essentiel est que, dans tous les cas, les contentions élastiques de classe 2 sont recommandées. La mise en place d’une thromboprophylaxie dépend ensuite du risque lié au type d’intervention et de celui du patient. Elle n’est ainsi pas indiquée en cas de risque chirurgical faible (proctologie, chirurgie de varices ou de la paroi abdominale…), À condition que le malade ne présente pas de facteurs de risques propres, mais doit être instituée systématiquement si le risque est modéré ou élevé. Par ailleurs, on sait que les malades cancéreux ont un risque de complications thromboemboliques majoré: il a été estimé, grâce à des études s’appuyant sur essentiellement sur la phlébographie, que, en l’absence de traitement préventif, ce risque concernait de 20 à 30 % des sujets porteurs d’un cancer, avec un risque d’embolie pulmonaire de 1,5 à 2 %. Ces malades nécessitent ainsi des doses plus élevées d’héparine de bas poids moléculaires (HBPM) qui doivent également être administrées sur une durée plus longue, soit pendant environ un mois. Le fondaparinux est, dans ce cadre, plus simple d’utilisation en raison de l’absence de nécessité de contrôle du taux plaquettaire, mais son emploi reste pour l’instant encore discuté du fait d’une augmentation du risque hémorragique. Néanmoins, il semble que ce risque soit minimisé lorsque la prescription ne débute pas avant les six heures suivant l’intervention.
Les obèses représentent une autre population particulière. Quel anticoagulant utiliser ? Et surtout à quelle dose et pendant quelle durée ? Autant de questions qui ne sont aujourd’hui pas entièrement résolues. À cet égard, un programme de recherche clinique national, dirigé par le Pr Steib (Strasbourg), est en cours, de façon à évaluer l’efficacité de différentes doses d’HBPM chez ces patients.
Le casse-tête des stents actifs.
Autre problématique est celle des patients mis sous antiagrégants plaquettaires ou antivitamines K (AVK) pour des raisons médicales et candidats à une chirurgie digestive. Dans ce domaine, les notions ont également évolué, notamment grâce aux recommandations émises par les Sociétés de gastro-entérologie et de chirurgie bucco-dentaire qui se sont particulièrement intéressées à ce sujet. On sait ainsi que désormais les gestes endoscopiques avec biopsies ne nécessitent plus l’interruption de l’aspirine ni du clopidogrel. En cas de chirurgie à risque de saignement réputé majeur ou modéré, la stratégie dépend d’une évaluation de la balance bénéfice/ risque. Une des difficultés, qui apparaît de plus en plus fréquente, est celle que posent les patients porteurs d’un stent actif et chez lesquels les antiagrégants ne doivent pas être interrompus, notamment au cours de la première année. Actuellement, l’attitude prônée est, sauf risque hémorragique majeur lié à l’intervention, de continuer le traitement par aspirine quel que soit le type d’intervention, comme cela est régulièrement t pratiqué en chirurgie cardiaque. Dans le cas du clopidogrel et s’il existe un risque de saignement important, il est parfois nécessaire d’arrêter l’antiagrégant de 5 à 10 jours avant l’intervention pour reprendre le traitement le plus tôt possible, c’est-à-dire dès la 24e heure postopératoire, en l’absence de saignement au niveau du drain.
De la même façon, les patients sous antivitamines K requièrent une stratégie particulière qui est maintenant assez bien standardisée. D’une façon générale, les AVK doivent être arrêtés cinq jours avant l’intervention avec un relais par héparine non fractionnée ou par HBPM bien que ces dernières n’aient pas, en France, contrairement aux États-Unis, d’autorisation de prescription dans cette indication. La dernière injection d’héparine non fractionnée est faite 24 heures avant la chirurgie et les AVK sont repris 24 heures après l’intervention.
Reste le problème des urgences chirurgicales chez des patients sous anticoagulants. Il faut alors envisager le recours au Kaskadil, mais qui peut entraîner un état d’hypercoagulabilité, ou, à la vitamine K en perfusion.
D’après un entretien avec le Pr Serge Rohr, Pôle de chirurgie générale et transplantation, hôpital de Hautepierre Strasbourg.
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