Qui a dit que les orthopédistes manquaient de psychologie ? Preuve du contraire, à Colmar, l'équipe de l'hôpital Schweitzer optimise les résultats de la chirurgie avec récupération rapide après chirurgie (RAC) en mettant l'accent sur la prise en charge du stress.
Car pour le service d'orthopédie qui était parmi les premiers à poser des prothèses totales de hanche (PTH) en ambulatoire en 2014, « pour nous, l'échec n'est pas une durée de séjour au-delà de 12 heures, c'est un patient qui n'est pas satisfait une fois de retour à domicile. La pose d'une PTH en ambulatoire n'est pas un but en soi. Nous n'insistons jamais pour convaincre un patient de se faire opérer en ambulatoire. La décision doit venir du patient lui-même ».
En revanche, les chirurgiens du service utilisent les procédures rapides pour tous les patients, jeunes et moins jeunes, en ambulatoire comme en hospitalisation classique. Car la RAC vise en priorité le confort du patient, la diminution de la durée de séjour n'étant qu'un corollaire. « La sortie n'est jamais imposée au patient, poursuit l'orthopédiste de cet établissement ESPIC (établissement de santé privé d'intérêt collectif) à but non lucratif. Le patient garde la possibilité de rester en cas de problème ou même seulement s'il le souhaite. Les bénéfices les plus importants sont d'ailleurs attendus chez les personnes âgées, qui ont tout à gagner à récupérer plus vite pour éviter les complications d'une hospitalisation prolongée ».
Détourner l'attention du stress
Pour garantir la réussite de la procédure de récupération rapide avec mobilisation immédiate après chirurgie (procédure MIRRAC), l'équipe alsacienne s'est organisée autour d'un fil rouge : détourner au maximum l'attention du stress et de la douleur.
C'est ainsi qu'à l'hôpital Schweitzer, différentes mesures ont été rapidement introduites. L'école des patients joue un rôle central pour donner au patient et à son entourage, - notamment le conjoint -, les moyens de participer aux soins. Pour le Dr Yves Michaud, l'une des difficultés de l'information « est de trouver un compromis pour rassurer le patient sans banaliser le geste chirurgical ni en minimiser l'importance et les risques éventuels ». C'est l'une des missions relevées par Isabel Nativo, cadre de santé, qui organise une réunion collective hebdomadaire avec des membres de l'équipe, notamment du kinésithérapeute, et si possible de patients déjà opérés.
Des professionnels plus disponibles
Des séances de rééducation collective ont pour but de favoriser l'émulation, tandis que la pratique de certains jeux vidéo concourt à améliorer l'équilibre, la coordination et à préparer le retour à une vie active normale. L'environnement se veut accueillant à travers l'architecture hospitalière, le contact avec la nature ou encore des expositions artistiques. Les patients sont sensibilisés à différentes techniques de gestion du stress telles que relaxation, sophrologie, méditation, hypnose, yoga. Le personnel soignant est formé et valorisé à pratiquer la communication non verbale.
Les chiffres sont au rendez-vous. À l'hôpital Schweitzer, depuis 2015, avec plus de 1 000 patients ayant suivi la procédure MIRRAC, la durée moyenne de séjour a baissé de 10 à 5 jours. Les hospitalisations de moins de 3 jours ont progressé au fil des années, passant de 14 en 2014, à 35 en 2015, à 72 en 2016 et déjà 76 depuis les 4 premiers mois de 2017. La RAC a fait des émules dans différents services au sein de l'hôpital, suivant l'exemple de l'orthopédie, notamment en chirurgie digestive et chirurgie vasculaire.
Pour le Dr Michaud, l'important pour la RAC « n'est pas de chercher la rentabilité mais de renforcer le sens du traitement. Une PTH, ce n'est pas qu'une histoire de mécanique, c'est aussi la prise en charge du patient dans son ensemble, et en particulier de l'obésité et la gestion du stress. C'est une philosophie ». Le personnel soignant a perçu les bénéfices pour lui-même de la gestion du stress et des ateliers de bien-être au travail ont été mis en place par l'équipe de rééducation. Des séances de relaxation (gym, yoga) sont proposées une à 2 fois par mois sous l'œil bienveillant de la cadre kiné Isabel Pereira. Pour le Dr Michaud : « Cela renforce la cohérence du traitement, le bien-être du personnel allant de pair avec celui des patients, et les soignants étant ensuite plus disponibles pour les soignés ».
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