L’ASTRAGALE fait partie intégrante de l’ensemble squelettique du pied qui ne compte pas moins de vingt-six pièces individuelles. À la fois clef de voûte de cet édifice et unité de transmission entre la jambe et cette extrémité du membre inférieur (considérée comme « le train d’atterrissage » de la dynamique de déplacement au sol), l’astragale se trouve inévitablement soumise à d’importantes contraintes mécaniques. De surcroît, cet os décrit comme l’assemblage d’un corps (englobant le dôme), d’un col et d’une tête, est quasiment entièrement recouvert de cartilage, à l’exception des zones d’amarrage capsulo-ligamentaires. Cette richesse en revêtement cartilagineux, combinée aux fortes sollicitations mécaniques rencontrées, prédispose cet élément squelettique singulier au développement de lésions intéressant à la fois une zone cartilagineuse donnée et le support osseux sous-chondral correspondant.
Un tableau clinique évocateur.
C’est le plus souvent dans les suites distantes d’une entorse de cheville, initialement interprétée comme banale, que la persistance de symptômes divers met sur la piste de lésions ostéo-chondrales de l’astragale. Qu’il s’agisse de douleurs plus ou moins localisées, d’épisodes intermittents de gonflement, d’un état de faiblesse, d’incidents fugitifs d’instabilité ou de blocage, ce cortège, complet ou non, d’anomalies de la fonction de cette articulation impose une évaluation approfondie. L’examen clinique outre ses manuvres standards classiques va s’attacher à rechercher des points douloureux exquis, des laxités anomales (tests dynamiques de varus ou de tiroir forcés). L’examen tendineux, neuro-musculaire et vasculaire ne manquera pas de compléter cette première étude articulaire clinique. À ce stade, s’il est déjà licite de suspecter des lésions ostéo-chondrales de l’astragale, on ne peut de toute façon faire l’économie d’un bilan d’imagerie.
La radiographie conventionnelle commence par un bilan standard avec une face, un profil, et des incidences dites malléolaires. Des incidences plus particulières viendront s’y rajouter afin de cibler de façon plus élective une zone retrouvée anormale au bilan standard.
Mais, il importe de garder à l’esprit que les radiographies peuvent ne pas détecter des lésions sans déplacement de l’os sous-chondral ou des lésions cantonnées au cartilage.
Le scanner est déjà plus utile d’un tel point de vue, bien qu’également limité dans son intérêt lorsqu’il s’agit de lésions cartilagineuses sans altération osseuse d’accompagnement. L’IRM est finalement l’imagerie la plus avantageuse, car elle est capable de visualiser des crevasses cartilagineuses mais également d’analyser les altérations sous-jacentes de l’os sous-chondral, l’éventuelle réaction démateuse de voisinage ou encore des dégâts de parties molles d’accompagnement (ligaments…). Son intérêt diagnostique est tel, malgré sa moindre disponibilité, qu’il paraît légitime de la prescrire en présence d’une cheville douloureuse rebelle, dans un groupe à risque, malgré l’absence de signes radiographiques d’atteinte ostéo-chondrale.
Une classification lesionelle indispensable.
Toutes les lésions ostéo-chondrales de l’astragale ne présentent pas la même gravité et ne partagent donc pas toutes une histoire naturelle évolutive commune. Elles font l’objet depuis un demi-siècle de systèmes de classification périodiquement remis à jour. Les objectifs poursuivis de tels efforts de classification lésionnelle sont multiples : tenter d’appréhender le plus fidèlement possible la réalité anatomo-pathologique ; cerner au plus près la gravité lésionnelle, c’est-à-dire surtout son potentiel de réversibilité ; dégager, si possible, un pronostic fondé sur l’observation évolutive de cohortes de profil lésionnel similaire ; finalement, guider les décisions thérapeutiques en fonction des données ainsi rassemblées.
Étant donné que le substratum anatomo-pathologique des lésions ostéo-chondrales de l’astragale est lui-même non univoque, on réalise à quel point les méthodes diagnostiques visant à l’élucider peuvent se révéler élusives. En effet, dans tous les cas, on se trouve en présence d’une alchimie de proportions variables entre des phénomènes d’altération chondrale et sous-chondrale. Compliquant cette distribution non homogène des topographies de dégradation tissulaire, la pathogénie de ces désordres est elle-même un mélange variable de phénomènes mécaniques (micro- ou macro traumatismes, microfractures…) ou vasculaires (zones ischémiques, ou nécrotiques ou de colonisation osseuse de substitution).
Que la classification adoptée soit radiographique pure ou améliorée par les imageries de dernière génération les systèmes de classification les plus consensuels tournent autour des cinq stades de gravité croissante (de 1 à 5) les plus classiques à l’origine de classification dite historique : simple tassement osseux sous-chondral ; petit « décroché » d’un fragment ostéo-chondral ; séparation sans déplacement d’un îlot ostéo-chondral ;
détachement complet et mobilisation d’un fragment ostéo-chondral ; cavité résiduelle et présence de kystes sous-chondraux.
Un traitement très personnalisé.
Les stratégies de prise en charge thérapeutique des lésions ostéo-chondrales de l’astragale sont infiniment variées : interviennent dans les éléments de décision non seulement le stade gravité lésionnelle mais également l’étendue de la lésion.
L’attitude non opératoire doit être dans un premier temps privilégiée plus particulièrement dans les stades inférieurs de gravité pour lesquels cette approche dispose d’environ une chance sur deux de succès. Un tel traitement non opératoire associe l’immobilisation par plâtre ou équivalent de la cheville à une mise en décharge plus ou moins stricte et plus ou moins prolongée.
Le traitement opératoire peut faire appel à des techniques à visée de régularisation ou à des techniques à visée réparatrices. Parmi les premières, il faut citer les méthodes dites de débridement, de micro-fractures au pic ou de microforages. Dans les secondes, il faut inclure les chondrotransplantations ou ostéo-chondrotransplantations par auto- ou allogreffes. Les techniques utilisées sont soit classiques par arthrotomie (à « ciel ouvert ») ou, alternativement, de plus en plus tentent de faire appel, lorsque cela est possible, à l’arthroscopie. En général ces traitements chirurgicaux obtiennent des résultats majoritairement satisfaisants, parfois aux termes de délais prolongés de récupération (pouvant aller jusqu’à deux ans).
D’après une conférence Dr Olivier Laffenêtre, Bordeaux.
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