DE NOTRE CORRESPONDANTE
EN CHIRURGIE orthopédique et traumatique, les pertes osseuses importantes demeurent un défi thérapeutique. Le traitement standard par les autogreffes osseuses n’est pas idéal : prélever de l’os autologue en un autre endroit signifie deux opérations pour le patient, deux sites de perte, et donc un risque accru d’infection ; de plus, le greffon peut ne pas s’intégrer suffisamment et nécessiter des interventions supplémentaires.
En quête de nouvelles stratégies thérapeutiques, la recherche s’est concentrée sur l’ingénierie tissulaire pour faciliter la régénération osseuse. Le succès de l’ingénierie tissulaire osseuse obtenu en chirurgie orale et maxillofaciale a motivé des équipes à étendre ces concepts à la régénération des os longs, et notamment du tibia puisque les pertes osseuses segmentaires surviennent le plus souvent à la diaphyse du tibia (60 % des pertes segmentaires).
La brebis, un bon modèle.
Reichert et coll. ont comparé, chez la brebis modèle de perte tibiale médio-diaphysaire, un traitement par autogreffe et le potentiel régénérateur d’une matrice (ou échafaudage) en polymère, nue ou combinée a des cellules souches mésenchymateuses (CSM) dérivées de la moelle osseuse autologue ou combinée au facteur de croissance rhBMP-7 (protéine morphogénique osseuse humaine recombinante).
Ils ont utilisé une matrice biodégradable de seconde génération (mPCL-TCP), composée de la polycaprolactone (mPCL) et du tricalcium phosphate (TCP), actuellement en phase de pré-autorisation par la FDA. Les matrices mPCL ont déjà reçu l’approbation de la FDA (Food and Drug Administration américaine) et de la Conformité Européenne pour la reconstruction des pertes osseuses craniofaciales.
Les matrices ont été implantées dans des pertes tibiales importantes (3 cm de long) chez des brebis, qui constituent un modèle très proche de la formation et de la structure osseuse humaine, et donc un bon modèle pour la régénération tissulaire osseuse.
Au bout de trois mois, les chercheurs ont constaté un comblement osseux chez 100 % des animaux traités par autogreffe ou matrice chargée de rhBMP-7, mais chez seulement 38 % des animaux traités par matrice nue ou combinée aux CSMs.
Comblement, formation osseuse, force.
Apres douze mois, l’imagerie par microtomographie et l’analyse biomécanique révèlent une plus grande formation osseuse et une force supérieure dans les matrices chargées de rhBMP-7, comparées a l’autogreffe.
Les auteurs attribuent cette amélioration avec le temps à la délivrance locale de la protéine morphogénique osseuse (plus grande stimulation de la formation osseuse par le BMP) et au dépôt osseux supérieur le long de la périphérie de la perte osseuse (force accrue).
L’ajout de CSMs n’a pas aidé la régénération osseuse, comme l’avaient déjà montré de précédentes études.
Il reste a déterminer quelle est la dose optimale du rhBMP-7 à administrer chez l’homme et les mécanismes sous-tendant les effets de la matrice/rhBMP-7 sur les cellules et le tissu environnants.
« La matrice biodégradable chargée du BMP-7 est un produit commercial qui peut être utilisé immédiatement », précise au « Quotidien » le Dr Dietmar Hutmacher (Université de Technologie du Queensland à Brisbane, Australie) qui a dirigé ce travail. « Des essais cliniques en Allemagne ont débuté, et nous projetons de lancer au début de l’année prochaine une étude multicentrique en Allemagne, en Autriche et en Australie. »
Reichert et coll., Science Translational Medicine, 4 juillet 2012,
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