Le congrès annuel de la Société Française de Chirurgie Orthopédique et Traumatologique est en constant développement : il a réuni l’an dernier plus de 4 000 participants dont environ le quart venu de pays étrangers. À l’heure où le congrès européen de l’EFORT (European Federation of Orthopaedics and Traumatology) est devenu annuel et tend à supplanter le congrès national de certains pays d’Europe, nous tenons à réaffirmer l’importance et l’originalité de notre réunion annuelle.
La langue française en reste la langue officielle et permet à tous nos confrères français ou étrangers francophones d’exprimer leurs idées et de communiquer même s’ils ne maîtrisent pas correctement la langue anglaise. Certes, nous devons dans le même temps attirer davantage de participants étrangers et accepter qu’ils s’expriment en langue anglaise qui reste la langue « scientifique » officielle, ce qui suppose une généralisation progressive de la traduction simultanée.
Notre réunion représente l’occasion à la fois de faire le point sur les indications et les techniques en traumatologie et en orthopédie « froide » en présentant les résultats de symposiums reposant sur des études prospectives et multicentriques et de valoriser la recherche fondamentale et clinique.
L’exemple du cotyle à double mobilité est à cet égard exemplaire : conçu initialement par Gilles Bousquet à Saint-Etienne, il s’est par la suite développé dans d’autres centres, dont l’école de Caen, et a donné lieu à des communications libres lors du congrès de la SOFCOT et des publications. Il est actuellement utilisé largement en France et fait l’objet cette année d’un symposium sous la direction de Paul-Henry Fessy, alors que son développement international bien qu’encore timide est en pleine progression.
Nous pourrions citer d’autres exemples démontrant l’importance de notre congrès pour la diffusion d’idées nouvelles et de travaux de recherche clinique :
- Le couple de friction Alumine-alumine, conçu par Pierre Boutin puis développé par Laurent Sedel et Jacques Witvoet et utilisé actuellement à l’échelle mondiale.
- La prothèse d’épaule inversée, conçue à Dijon par Paul Grammont et en plein développement, aussi bien en traumatologie que pour le traitement de l’omarthrose.
Les tiges fémorales verrouillées, utilisées initialement par Jacques Vives et son école d’Amiens, puis par Charles Picault et bien d’autres.
- Le concept de prothèse de hanche sans ciment, initialisé par Robert Judet dès 1970, puis repris et amélioré par la modification de l’état de surface et l’introduction de l’hydroxyapatite.
Tous ces concepts ont été développés certes souvent par des laboratoires labélisés de recherche (équipes universitaires, INSERM ou CNRS) mais également, et il faut le souligner, grâce au travail de groupes de recherche regroupant des chirurgiens travaillant dans le secteur privé s’appuyant souvent sur des compagnies de matériel chirurgical. Il convient de saluer le travail de ces groupes en matière de recherche clinique et de souligner que le congrès de notre société a très souvent été le cadre de leurs communications initiales. Nous pouvons craindre qu’actuellement les travaux de tels groupes soient rendus plus difficiles, voire impossibles, en raison de la diminution des budgets de recherche et développement imposée, entre autres causes, par les modifications de tarification en cette période de rigueur.
En dehors de son aspect purement scientifique, notre réunion annuelle comporte une partie importante concernant notre vie professionnelle : outre différentes séances consacrées à l’évaluation des pratiques professionnelles ou aux recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS), une journée entière, la journée Orthorisq du vendredi, est désormais dévolue à la gestion des risques en chirurgie orthopédique et traumatologique. Cette formation est devenue indispensable pour s’engager dans le processus d’accréditation initié par l’HAS.
La multiplication des formalités et formations de ce type sous-entend une judiciarisation croissante de nos rapports avec les patients : il est vrai que, s’il n’atteint pas et de loin celui des États-Unis, le nombre de plaintes a nettement augmenté au cours des dernières décennies, alors que dans la même période de formidables progrès techniques ont été effectué dans notre spécialité. Ceci est en partie lié au fait que nous sommes pratiquement soumis à une obligation de résultat : qui n’a pas rencontré au cours de sa carrière un patient déçu après une prothèse totale de hanche parce qu’il a une différence de longueur de 1 cm alors que sa hanche est devenue indolore et mobile. Dans les années 1960 ce même patient aurait été reconnaissant à son chirurgien d’avoir simplement rendu sa hanche moins douloureuse après une ostéotomie de Mac Murray ou de varisation, même au prix d’un raccourcissement important.
La chirurgie orthopédique victime de son succès ? Sans doute, mais cette exigence croissante du patient est dans l’ordre des choses et il ne faut pas s’en étonner.
Notre spécialité reste un domaine d’avenir pour des raisons heureuses (vieillissement progressif de la population) ou malheureuses (régression limitée de la traumatologie routière). Notre devoir est de former les futures générations de chirurgiens orthopédistes et pour cela de développer l’enseignement et la recherche.
Puisse ce congrès 2009 y contribuer !
Président de l’AOT
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