LE PATIENT est un homme de 28 ans qui avait subi il y a cinq ans un grave accident à un ball-trap. Un coup de fusil de chasse imprudemment manipulé emportait toute la partie basse du visage du jeune homme. Malgré de nombreuses opérations, très bien réalisées (lambeaux chirurgicaux, tentative de reconstitution de la mandibule par un prélèvement sur le péroné), le jeune homme restait gravement handicapé. Les lésions étaient tellement importantes que le patient ne pouvait plus s’alimenter ni parler normalement. Il avait perdu la musculature péri-orale. Il vivait avec une trachéotomie et une jéjunostomie.
Indication fonctionnelle.
« L’indication est avant tout fonctionnelle. Le patient avait perdu la continence labiale, il ne pouvait plus avaler. Il ne pouvait plus respirer normalement lorsqu’il avait quelque chose dans la bouche. De son nez, il restait juste la couverture cutanée », précise le Pr Lantieri.
Dès qu’un donneur répondant à l’ensemble des critères a été disponible, les Prs Laurent Lantieri et Jean-Paul Méningaud, accompagnés d’une quinzaine d’internes et de chefs de clinique, ont réalisé la greffe. L’intervention a duré dix-sept heures, pour se terminer vendredi matin à 8 heures.
S’il est encore tôt pour faire un bilan d’une intervention de chirurgie majeure, on peut dire que d’un point de vue local, le patient va aussi bien que possible. Il ne présente par d’hématome, ce qui peut représenter une complication de la première semaine, avec également les risques d’infection et de caillot. Les rejets sont à craindre pendant le mois qui suit.
« Le don d’organes est une grande cause nationale en 2009 », rappelle le Pr Lantieri. « Cette greffe s’inscrit dans cette cause. Il y a une famille suffisamment généreuse pour permettre le prélèvement du greffon. »
Programe hospitalier de recherche clinique.
Pour les greffes, chaque année, 1 400 prélèvements sont réalisés alors qu’il y a un total de 2 000 personnes en mort cérébrale. Beaucoup de familles refusent encore. « On prélève surtout les organes internes. Les tissus sont déjà plus difficiles à obtenir, comme la peau nécessaire aux grands brûlés et la cornée. Lorsqu’il s’agit de zones visibles - mains, face -, il est exceptionnel d’avoir un accord des familles. »
Deux équipes réalisent des greffes du visage en France. L’équipe des Prs Dubernard et Devauchelle, qui a fait une première mondiale en 2005 à Amiens chez une jeune femme après un grave accident. Et celle du Pr Lantieri, qui reconstruisait en 2007 le visage d’un jeune homme de 29 ans défiguré par une neurofibromatose de von Recklinghausen.
Cette nouvelle greffe s’inscrit dans un Programme hospitalier de recherche clinique (PHRC), prévu pour inclure cinq patients. Trois sont actuellement sur liste d’attente. « Cette greffe est plus importante en terme de reconstruction que les deux précédentes, précise le Pr Lantieri . Quatre-vingts pour cent du visage ont été reconstruits, ce qui est équivalent à la patiente greffée dans l’Ohio au début de l’année 2009. Personne n’a fait encore la partie haute du visage. Les paupières posent des problèmes différents en matière de reconstruction. »
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?