LE RECEVEUR est un patient qui avait été carbonisé dans l’incendie de sa maison, en 2004. Très gravement brûlé, ce jeune homme a été traité dans un centre de grands brûlés. Brûlé à 90 % de la surface corporelle, il a été sauvé et a survécu grâce aux progrès de la réanimation. Les séquelles ont été très importantes. Il a subi une amputation de tous les doigts jusqu’au niveau des métacarpes. Presque toute la face était brûlée, en dehors des lèvres qui n’ont été atteintes que superficiellement et ont conservé leurs qualités et leur muscle orbiculaire. Toute vie sociale était impossible pour ce malheureux jeune homme, malgré des interventions de chirurgie réparatrice effectuées par le Pr Lantieri. Ainsi, un lambeau d’épiploon a été branché sur les vaisseaux du cou pour couvrir le crâne complètement dégarni de peau et une couverture des yeux sans paupières a été réalisée également avec un lambeau, pour éviter les séquelles du dessèchement de la cornée. Les yeux sont restés fonctionnels.
Depuis mai 2008, sur une liste d’attente.
« Le patient a été intégré dans notre programme hospitalier de recherche clinique (PHRC), explique le Pr Lantieri. Depuis mai 2008, il est sur une liste d’attente. Une famille a été d’accord pour que soit réalisé un prélèvement de tous les tissus chez un donneur. »
« Il faut souligner l’importance de l’anonymat et de la gratuité du don d’organe, conditions qui permettent la pérennisation de ces dons. C’est pourquoi nous ne délivrons aucune information sur l’endroit où le prélèvement a été réalisé », souligne le Pr Lantieri.
Le prèlèvement et le don ont été coordonnés par plusieurs équipes. Pour la face, il y a eu l’équipe préleveuse du Pr Jean-Paul Méningaud et l’équipe receveuse coordonnée par le Pr Lantieri.
La transplantation a débuté samedi soir 4 avril dans le Val de Marne. « Le grand avantage de la région parisienne est que les équipes peuvent se déplacer rapidement. » Elle a mobilisé une quarantaine de personnes pendant une trentaine d’heures, avec la coordination de plusieurs équipes. Les transplantations ont été réalisées de façon synchrone pour réduire la durée de l’ischémie. L’opération de la face a été pratiquée par l’équipe du Pr Lantieri et du Dr Jean-Paul Méningaud (Henri Mondor) et celle des mains par l’équipe du Dr Christian Dumontier (hôpital Saint-Antoine). « Actuellement, les greffes de mains peuvent être considérées comme du soin, alors que la greffe de visage reste du domaine de la recherche. » Les mains ont été transplantées au-dessus du poignet.
Parties haute et basse, y compris les paupières.
Jusqu’ici, dans les 6 greffes de la face pratiquées dans le monde, seulement la partie basse du visage a été transplantée. Un aspect très différent de cette dernière greffe est que les spécialistes ont transplanté les parties haute et basse, y compris les paupières, les oreilles et le cuir chevelu.
« Il va se passer du temps avant que l’on évalue pleinement les résultats. » Il faut que les nerfs repoussent, que les muscles orbiculaires des paupières retrouvent leur fonction. « Les greffes n’ont de finalité que si elles sont dynamiques, prélevées avec les muscles. »
Une technique subtile a été appliquée pour les paupières qui sont particulièrement complexes à reconstruire, car outre le muscle orbiculaire, les glandes lacrymales et le muscle releveur des paupières doivent retrouver leur fonctionnalité.
Dans le cas présent, les lèvres du patient avec leur muscle orbiculaire resté fonctionnel ont été conservées.
Pour sa part, le patient est en réanimation, maintenu en sommeil induit et « il va aussi bien que possible après 30 heures de chirurgie et une transfusion massive. »
« Tout ceci n’est possible que parce que nous bénéficions d’un système hospitalo-universitaire public, et d’une bonne organisation du don. Et aussi d’un personnel volontaire et dynamique (anesthésistes, réanimateurs, chirurgiens, infirmiers du bloc…) », salue au passage le spécialiste.
Le Pr Lantieri a réalisé il y a peu de jours, le 27 mars, une greffe de visage chez un homme de 28 ans défiguré par un coup de fusil accidentel. Ce patient est maintenant complètement réveillé. Encore en réanimation il va bien, il respire spontanément et n’a pas de signes de rejet.
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