En raison de l’absence de traitement actuel de l’infertilité utérine, la transplantation utérine apporte un espoir pour de nombreuses femmes ne pouvant à ce jour espérer mener une grossesse, contrairement aux patientes présentant une infertilité d’origine ovarienne ou tubaire.
En Europe, une femme sur 500 en âge de procréer, de 18 à 35 ans serait victime d’une infertilité utérine, de façon congénitale ou acquise. Deux cent mille personnes seraient concernées. En France, elles seraient plusieurs milliers. Des données précises sont toutefois difficiles à obtenir.
L’équipe du Pr Mats Brannstrom en Suède, pionnière dans ce domaine, a pratiqué des greffes d’utérus à partir de donneuses vivantes.
Ces transplantations réalisées sur une dizaine de patientes sont un succès. Une première naissance a déjà eu lieu en octobre de l’année dernière. Elle ouvre une ère nouvelle en procréation médicalement assistée (PMA). Les résultats des grossesses menées chez six autres patientes avec greffon fonctionnel sont attendus avec intérêt.
L’utérus provient généralement de la mère de la patiente, avec tout ce que cela représente sur le plan psychologique. En effet, la mère, donneuse de son utérus pour sa fille, peut culpabiliser si l’opération échoue et ce d’autant plus qu’elle se reproche déjà souvent d’être responsable du handicap de sa fille. Cette chirurgie est particulièrement lourde et longue, supérieure à 10 heures pour prélever l’organe et 4 à 6 heures pour le greffer. Par ailleurs, l’obtention d’une vascularisation utérine suffisante assurant la perfusion et le drainage veineux semble difficile.
« Le prélèvement sur donneuse vivante n’est pas anodin, il comporte un risque non négligeable de complication pour la donneuse (de l’ordre de 20 %), d’autant plus contestable que l’organe n’est pas vital (risque hémorragique et thrombo-emboliques). Il y a un risque potentiel pour un succès incertain, soit la survenue d’une naissance », souligne le Dr Tristan Gauthier (chirurgien gynécologue au CHU de Limoges).
Information et sélection rigoureuse des patientes
En France, le Dr Tristan Gauthier a choisi de mener ses travaux sur la greffe d’utérus à partir de donneuses décédées. Le recours à une donneuse en état de mort cérébrale présente des avantages. « Il nécessite une chirurgie plus simple, de durée plus courte (30 minutes). On peut avoir des donneuses plus jeunes que des donneuses vivantes ménopausées, augmenter ainsi potentiellement les chances de réussite et résoudre le problème éthique de l’anonymat du donneur vivant », explique le Dr Tristan Gauthier.
Avant de lancer un protocole de recherche clinique, l’équipe française, qui vient de recevoir l’accord pour le financement de l’essai clinique, attend encore le feu vert des autorités administratives.
Cela fait plusieurs années que l’équipe de Limoges mène des recherches dans ce domaine en ayant d’abord conduit des essais de greffes d’utérus sur des brebis. Depuis que les travaux ont commencé à se faire connaître, de nombreuses femmes privées d’utérus voient dans cette technique l’ultime recours pour avoir un enfant. « Nous allons sélectionner de façon stricte les femmes pouvant en bénéficier : des femmes en état de produire des ovules, des femmes motivées, aptes et conscientes. Il faut aussi procéder à une évaluation psychologique du couple. Il ne faut pas idéaliser la greffe », ajoute le Dr Tristan Gauthier.
C’est ainsi qu’une consultation d’information sur la transplantation utérine a été ouverte au CHU de Limoges, pour bien informer les femmes et leur expliquer qu’il s’agit d’un geste potentiellement à risque et contraignant dont le succès est incertain. Les patientes qui pourront bénéficier d’une telle greffe sont celles atteintes d’une agénésie utérovaginale de Rokitansky (1 cas sur 4 500 filles) ou ayant subi une hystérectomie pour pathologie bénigne.
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