PAR LE Pr CARLE PAUL*
EN 2009, trois anti-TNF alpha sont disponibles pour le traitement du psoriasis. Il s’agit de médicaments d’exception, leur prescription étant réservée au spécialiste. Deux sont des anticorps monoclonaux : l’infliximab (Remicade) et l’adalimumab (Humira). L’infliximab est un anticorps chimérique, administré par voie intraveineuse, pouvant donc générer la production d’anticorps susceptibles de réduire l’efficacité du traitement qui, à court terme, est remarquable : environ 8 patients sur 10 ont une amélioration de plus de 75 % du score de sévérité du psoriasis, le PASI, en 10 à 12 semaines. Dans 20 à 25 % des cas, il existe un épuisement de la réponse clinique dans les mois ou les années suivant l’initiation du traitement nécessitant soit un rapprochement des intervalles entre chaque perfusion, soit l’association à de petites doses de méthotrexate.
L’adalimumab (Humira) est un anticorps humain, ce qui permet de réduire son immunogénicité, administré par voie sous-cutanée. Son efficacité est également très bonne :environ 7 patients sur 10 ont une amélioration de plus de 75 % du PASI à 12 semaines. L’arrêt du traitement s’accompagne souvent d’une rechute du psoriasis sans phénomène de rebond dans les mois suivant l’arrêt. Le retraitement est possible avec une réponse clinique préservée.
L’etanercept (Enbrel) est une protéine de fusion dimérique recombinante humaine, administré par voie sous-cutanée. La durée totale d’un cycle de traitement dans le psoriasis en plaques sans atteinte articulaire est de 6 mois, mais les retraitements sont possibles. En effet, environ 50 % des patients rechutent 12 semaines après l’arrêt du traitement. Son efficacité thérapeutique est un peu inférieure :environ 3 patients sur 10 ont une amélioration de plus de 75 % du PASI à 12 semaine à la dose de 50 mg/semaine et 5 patients sur 10 à la dose de 50 mg 2 fois par semaine. Depuis décembre 2008, l’étanercept peut être prescrit dans le psoriasis sévère de l’enfant de plus de 8 ans, en cas de résistance à la photothérapie ou aux autres traitements systémiques. La réponse clinique chez l’enfant semble un peu supérieure à celle de l’adulte.
Une réponse clinique incomplète ou un épuisement de la réponse au bout de quelques mois peuvent inciter à changer de classe thérapeutique. Il a été récemment montré que les patients obèses répondent moins bien aux agents biologiques, principalement du fait d’une pharmacocinétique moins favorable.
Le profil de tolérance de ces produits semble similaire à ce qui a été observé dans les rhumatismes inflammatoires. La fréquence des tuberculoses paraît plus élevée avec les anticorps monoclonaux comparativement à l’étanercept d’après le registre RATIO. La possibilité d’exacerbation paradoxale de psoriasis ou de survenue de formes particulières (psoriasis pustuleux ou inversé) ont été rarement rapportées.
Les agents ciblant les interleukines 12 et 23.
L’interleukine 12 (IL-12) et l’interleukine 23 (IL-23), cytokines importantes de la réponse inflammatoire, sont des hétérodimères comportant une sous-unité commune p40. Plusieurs agents ciblant spécifiquement cette dernière sont en développement. Le plus avancé est l’ustekinumab (Stelara) qui a obtenu une AMM européenne en janvier 2009 et qui est administré par voie sous-cutanée. A 12 semaines, environ 7 patients sur 10 ont une amélioration de plus de 75 % du score PASI et environ 1 patient sur 2 est blanchi ou presque à 28 semaines. Une rechute survient habituellement dans les 4 à 5 mois suivant l’arrêt. Le profil de tolérance à court terme semble très favorable, la fréquence des effets indésirables étant similaire au placebo dans les études cliniques. Ses indications sont similaires à celles des anti-TNF alpha : psoriasis modéré à sévère intolérant ou résistant aux traitements systémiques. Ce type de produit laisse entrevoir la possibilité de contrôler le psoriasis avec une injection tous les trois mois mais des études au long cours sont nécessaires.
Suspension d’AMM.
L’efalizumab (Raptiva) est un anticorps monoclonal ciblant le LFA-1, molécule d’adhésion impliquée dans la co-stimulation des lymphocytes T et dans leur migration dans les organes comme la peau ou le système nerveux central et utilisé depuis 2004 en Europe.
Le 19 février 2009, l’Agence Européenne du Médicament annonçait la suspension de sa commercialisation suite à la survenue, aux États-Unis et en Allemagne, de plusieurs cas de leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP), une infection virale grave du système nerveux. Aucun cas n’a été observé en France où il est estimé qu’entre 500 et 600 patients étaient sous Raptiva en février 2009. Les quatre patients ayant présenté infection étaient tous sous traitement continu depuis plus de trois ans. On estime que l’effet du Raptiva dans l’organisme disparaît complètement 1 à 2 mois après l’arrêt du traitement : le risque de LEMP pour les patients traités pendant plusieurs années par Raptiva diminue donc très rapidement à l’arrêt du traitement. Cela est en accord avec ce qui a été observé avec une autre biothérapie dont le mécanisme d’action est analogue et utilisée pour le traitement de la sclérose en plaques, le natalizumab et qui a été associée à la survenue de LEMP. Aucun cas de LEMP n’a été rapporté après l’arrêt du traitement. Tous les patients traités par Raptiva en France doivent stopper leur traitement de manière progressive en collaboration avec leur dermatologue qui sera à même de leur proposer une alternative thérapeutique.
* Service de Dermatologie, CHU de Toulouse, et Université Paul-Sabatier, Toulouse.
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